One-Punch Man ou l'autodérision maîtrisée, fantasque et fantastique. "Nouvelle" goutte d'eau dans l'océan du manga, OPM ne révolutionne rien, n'invente rien et surprend peu. Œuvre aux influences trop multiples pour les énumérer toutes (citons tout de même quelques-unes des plus évidentes avec Dragon Ball, One Piece, Berserk ou encore Ghost in the Shell), ce manga peut toutefois se targuer d'une qualité trop rare pour ne pas être découvert par les amateurs de la bande-dessinée nippone. Surtout, son apparition résonne comme un nouvel espoir dans cet univers –beaucoup- trop commercial. OPM brise tous les codes établis tout en les mettant bien en évidence.
Toujours avec la même aisance, et souvent avec cohérence, le propos oscille vers les antagonismes, tantôt avec légèreté, tantôt vigoureusement... Réaliste, fantastique, burlesque, sérieux, ridicule, grandiose, solennel, pathétique, drôle, triste... One Punch Man mêle tout et n'importe quoi. Avec une simplicité à l'intelligence diabolique, l'univers comme les dialogues s'imposent avec une efficacité perverse. Perverse, car l'on aimerait bien pouvoir le critiquer, ce nouveau-venu avec ses clichés qui s'étendent jusqu'aux noms des villes ou des personnages. Mais ses points faibles sont trop anecdotiques pour entacher l'expérience de sa découverte. Alors, on se détend et on apprécie la lecture de ses pages avec la même passion que l'on visionne les douze premiers épisodes de sa série animée*. Fait suffisamment rare pour être souligné, l'adaptation en série animée est d'une qualité remarquable et fidèle au manga.
Sur une planète humaine à peine plus évoluée que la nôtre, les monstres apparaissent et font ce qu'on attend de tout monstre. Ils tuent et ravagent tout. Mais il existe sur Terre un "monstre légendaire", plus puissant encore. Un être divin ou diabolique, inconnu de tous. Il est aussi un homme, un super-héros anti-héros, un crâne d'œuf au sens premier du terme. Cape blanche flottant au gré du vent, il expose fièrement son pyjama aux couleurs du soleil, ses bottes en caoutchouc et ses gants de vaisselle écarlates. Cet homme-là, c'est Saitama. L'homme le plus fort du monde. "Habité d'une puissance divine", Saitama déchiquette ses ennemis en un seul coup (le plus souvent du poing), légitimant le nom du manga. Sous ses airs de Buddha moderne, il passe chacune de ses journées à affronter son pire ennemi, inévitable compagnon de l'être le plus puissant : l'ennui.
Effrayant pitch s'il en est. Quid des apparences ! Personnages intéressants et variés, situations travaillées, efficaces. L'humour et la contemplation s'ajoutent à l'action dans un équilibre souvent judicieux. Si l'auteur persiste à prendre ses lecteurs au sérieux, son œuvre marquera plus que sa génération. Mais One Punch Man ne se raconte pas, il se découvre. Parfois, curiosité obtient juste récompense, encore faut-il sourire un instant et tenter le pas en avant.