Over Bleed ne fait dans la dentelle. Son pitch initial tel que communiqué par Ki-Oon annonce assez clairement la couleur sur le contenu dur de ce manga :
Kei est un lycéen martyrisé quotidiennement par une poignée de camarades dans l'indifférence générale. Usé par ces humiliations incessantes, il accepte l'étrange proposition de son ami d'enfance, Akira : se suicider ensemble, pour mettre fin au cauchemar. Mais ce jour-là, Kei en réchappe, et pas Akira.
Des mois plus tard, le jeune homme découvre avec stupéfaction sur Internet un site de combats de rue. Sur plusieurs des vidéos mises en ligne, un Akira méconnaissable inflige une correction mémorable à ses adversaires ! Que s'est-il réellement passé ? Pour le découvrir, Kei n'a plus qu'une solution : s'inscrire à son tour sur le site pour, de combat en combat, remonter jusqu'à Akira...
Et le premier constat est que c'est bel et bien dérangeant. Quand je dis dérangeant, je veux dire que ça nous interpelle mais ce n'est pas non plus insoutenable.
Et, à titre personnel, ce malaise ne vient pas uniquement des combats et de leur violence (on a vu pire dans les mangas) mais plus du coté réaliste et gratuit des brimades et humiliations subies par Kei.
Ces scènes sont criantes de vérité et dérangent. On en vient à comprendre le cheminement qui mènent ces deux jeunes à se suicider.
En plus, il y a un coté voyeur morbide, même si 28Round ne joue pas là-dessus, avec cette vidéo tournée avant la tentative de suicide.
Over Bleed met aussi en exergue un problème récurrent et dramatique au Japon, les suicides de jeunes.
Si on rajoute à cela des combats violents et crus, on comprend que ce titre ait créé une certaine polémique au Japon (plus dans le fond que la forme).
On va donc suivre le voyage (presque initiatique) qui va mener la victime brutalisée qu'est Kei à celui de combattants et donc sortir de sa position de victimes passives. Prônant la violence comme réponse à la violence, Over Bleed n'a pas un discours moral.
Malgré sa classification seinen, il y a quand même bien un coté shônen, avec un héros nul mais qui va chercher à s'améliorer et affronter des adversaires plus puissants.
Kei va donc changer de comportement et s'affirmer de plus en plus, malgré une technique limitée. Cette phase est plutôt bien faite, intéressante et rythmée. Son changement va concerner aussi bien sa recherche d'Akira et donc dans les combats, dans le cadre de l'Over Bleed, que dans sa vie de lycéen brimé.
Le tout est traité de manière assez sombre et dure. On ressent bien le mal de vivre de Kei. C'est très immersif, et on suit avec beaucoup d'attention son parcours pour rencontrer Bunen.
Par contre tout n'est pas rose non plus. D'une part il y a un coté violent et dérangeant plus sur le fond que la forme qui peut rebuter certains lecteurs.
Ensuite, les combats de Kei manque de crédibilité. Il ne maitrise aucune technique de combat, ne s'est jamais battu mais arrive à faire face à des bagarreurs aguerris. Certes 28Round justifie ces victoires par un style de chien enragé, se battant comme il peut, à l'instinct, avec des objets et sans style. Néanmoins, on a bien du mal à croire qu'il arrive à se sortir des situations dans lesquelles il se met.
Autre point qui fait « tâche » c'est la réaction de l'infirmière. Elle voit que ses élèves sont blessés et donc se battent, et sa première réaction est de jouer la fangirl, de donner des conseils. Complètement improbable.
Fort heureusement, même si c'est agaçant ça ne perturbe pas trop la lecture.
Graphiquement, même si j'ai eu l'impression que la qualité était inégale, les scènes de combat font réalistes et nerveuses. Parfois elles font un peu statiques, mais le découpage dynamique rattrape cette impression. Néanmoins on sent que le mangaka a porté un soin tout particulier sur les postures de combats, les tuméfactions et l'impact des coups.
Les cases sont détaillés et les personnages travaillés.
Pour conclure ce Over Bleed est un manga qui n'est pas fait pour tout le monde, parce c'est un peu violent et les thèmes abordés (suicide, maltraitance, combats de rue) peuvent choquer. Mais quand on s'attarde plus sur le contenu, on s'aperçoit que c'est une histoire qui se lit très bien, assez simple mais qui va droit au but. C'est dynamique et intéressant. Tout ce qui touche à la baston est bien réalisé. On regrettera quelques raccourcis un peu facile et une infirmière pas crédible une seconde. Graphiquement, la qualité est bonne avec une mise en scène dynamique et une ambiance sombre.
L'intrigue avance rapidement et le lecteur ne s'ennuie pas. C'est un premier tome encourageant, frappant et qui donne envie de lire la suite.