Pandora Hearts
6.4
Pandora Hearts

Manga de Jun Mochizuki (2006)

Se plonger dans Pandora Hearts c'est en devenir un acteur à part entière qui, lui aussi plongé dans l'Abysse, subira les événements plus qu'il ne les comprendra et qui n'accédera à la vérité qu'après avoir assemblé toutes les pièces de cet immense puzzle glanées au gré des vingt-quatre tomes.


J'avais arrêté la lecture de ce manga en fin d'année 2013. La raison est assez simple : d'un tome à l'autre j'avais oublié la moitié des twists et ces incompréhensions m’empêchaient non seulement de bien saisir l'action mais aussi d'être investi émotionnellement.
Quand le tome 24 est paru en 2016 je me suis dit que j'allais tout relire mais j'étais resté sur cette impression de masse insondable d'informations aux intrigues obscures et il m'a fallu trois années supplémentaires pour trouver le courage de replonger dans l'Abysse. Et cinq jours pour en dévorer les vingt-quatre tomes.


Quelle aventure. Quelle épopée ! Pour les différents personnages tout comme pour le lecteur, tous en quête de vérité.
Pandora Hearts est construit comme une avalanche de révélations et retournements de situation autours d'une tragédie vieille d'un siècle, de ses conséquences et des différents protagonistes de celle-ci. Les archétypes mis en place au début du récit volent rapidement en éclat, s'éloignant des sentiers de narration traditionnels pour nous dépeindre une fresque sombre aux personnages complexes, ambiguës et régulièrement torturés que ce soit par leur passé, leurs promesses, leur devoir ou bien hantés par tous ces dilemmes à la fois.
L'auteure joue tout au long de son oeuvre avec l’empathie que nous plaçons en ses personnages, au fil des tomes on apprendra à se méfier de nos préférés, se surprendra à apprécier les perfides mais aussi, évidemment diront certains, on subira de plein fouet drames et autres scènes d'une profonde tristesse.


Ce devait faire excessivement longtemps qu'une oeuvre de fiction ne m'avait pas arraché une larme... Au-delà d'un Stark qui avait su me rendre tristounet ou d'un John Coffey qui m'avait sacrément noué la gorge, c'est bien Break, au détour de pages de papier, sans animation, sans musique ni artifice, qui parvint à humidifier mon oreiller. J'aurais probablement été davantage sujet à l'émotion si je ne m'étais pas désamorcé d'autres drames de par ma lecture irrégulière jusqu'en 2013 (Oscar, Eliott...) De même le personnage de Zwei est assez complexe à saisir entre Dledee et ses Dledum ce qui m'a empêché d'apprécier, si je puis dire, la mort du personnage d'Écho tout court pour lequel j'avais pourtant de la sympathie.


Cependant je reste conscient des défauts de l'oeuvre, à commencer par le léger manque de développement de certains personnages secondaires tels Ada Vessalius ou Dug Baskerville qui souffre de la comparaison avec le traitement auquel ont droit des personnages aussi fascinants que Vincent Nightray, Xerxes Break et tant d'autres que je ne citerai pas pour limiter les spoilers.
Certains ressorts scénaristiques flirtent aussi parfois avec l'usage excessif, citons souvenir interrompu et mémoire vacillante. De même on peut pointer du doigt quelques rares intrigues moins rythmées, faciles ou qui m'ont juste semblé peu pertinentes, typiquement Jury ; et à l'inverse des twists tellement énormes qu'il faut les relire plusieurs fois le temps de traiter l'information, digérer l'information, assimiler l'information... ceux qui ont lu l'intégralité des tomes en savent quelque chose !
Toutefois, qu'importe le degré de complexité des intrigues, tout est limpide une fois l'oeuvre terminée et naît alors ce sentiment assez sympathique d'être nous aussi, tout comme les protagonistes, parvenus à faire la lumière sur l'Abysse, Sablier, etc...


Un rapide petit mot sur les illustrations qui ont leurs pros et leurs antis, pour ma part je ne suis pas particulièrement adepte de ce style gothico-victorien où 80% des personnages ont les cheveux dans les yeux mais les planches sont belles, l'ambiance graphique agréable et certains décors magnifiques, notamment le cloître où repose Lacie...
Transition toute trouvée pour évoquer l'OST (Melody) Lacie qui me semblait simplement tristounette au premier abord mais n'a pas manqué pas de me fendre le cœur après lecture de l'oeuvre.
Oui, il y a une différence d'appréciation et d'implication entre un tome tous les cinq mois et trois, puis quatre, puis six par soir.


En conclusion une oeuvre riche, complexe et pleine de nuances et de rebondissements qui demandera votre pleine attention si vous ne souhaitez pas vous y égarer tel un contractant plongé dans l'Abysse. Sincèrement admiratif de ce tortueux récit de Jun Mochizuki bien éloigné du manichéisme traditionnel des Shōnen. Je recommande.


NotaBene : Le fond n'a volontairement pas été abordé, a priori arrivé ici vous n'avez peut-être aucune idée de quoi parle l'histoire. Disons simplement que cela évite le spoil, libre à vous de vous renseigner davantage sur ce synopsis, d'autres critiques évoquent surement les chains, leurs contractants, Pandora et les Baskerville,... ou ne serait-ce que les personnages principaux. À vos risques et périls !

verveine1
8
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Créée

le 12 oct. 2019

Critique lue 283 fois

Verveine

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