Au début je voulais mettre 9 à cette Bd, mais en y réfléchissant, ce récit a été une telle claque et n'y trouvant absolument aucun défaut, j'ai passé la barre du 10 que je mets pourtant très rarement.
Après un très réussi Morgane, qui revisitait le mythe Arthurien, Stéphane Fert s'attaque aujourd'hui au conte des frères Grimm du même nom ( ou toutes fourrures ) - plus connu du grand public avec le film peau d'âne ( qui est lui même une revisite du conte ).
Ce volume gagne en maturité et en richesse et Stéphane Fert nous livre ici un chef d’œuvre.
Graphiquement le récit est superbe, l'auteur jongle adroitement entre découpage séquentielle classique et avec des planches pleines page ou les personnages naviguent dans différentes temporalités / lieux, rappelant ainsi certaines fresques médiévales. On retrouve d'ailleurs ce principe dans l'excellent «l'age d'or » de Prédrosa.
Les dessins sont superbes et rappellent la peinture postimpressionniste. Les personnages se transforment d'une page à l'autre sans jamais perdre le lecteur, permettant au contraire de se projeter naturellement dans ce monde onirique et de faire évoluer graphiquement leurs émotions-état d'ames.
Cette revisite du conte est une réussite totale. A la fois très originale, sombre, parfois drôle ( mention spéciale à la sorcière -euuu pardon madame la fée- Margot ) et surtout d'une grande richesse. Certains éléments clefs du contes de base sont bien présents : le père qui veut épouser sa fille, les robes, la coquille de noix, la fée, la robe en fourrure, mais ils sont remaniés, torturés, transformés, dans un récit neuf et original.
Le conte est à la base un récit qui permet aux enfant de comprendre, à travers des histoires fantastique, les épreuves qu'ils vont devoir affronter lors de leur passage à l'adolescence et à l'age adulte. Cette relecture ne déroge pas à la règle, mais en modernisant ce principe car ce conte adulte va nous faire réfléchir sur la pression que peuvent avoir les femmes dans notre société actuelle et les épreuves qu'elles vont devoir braver.
Certaines scènes sont juste époustouflantes d'inventivité là ou beaucoup d'auteurs seraient passés par la case cliché; je pense en particulier à
la scène d'amour entre Lou et Ronce
qui est juste sublime.
Aucune fausse note dans ce récit cruel, qui arrive à nous surprendre du début à la fin, ne laissant jamais la place à la facilité. Un de mes plus gros coup de cœur de ces dernières années.