Amateurs de western, vous serez servis avec cette histoire ! C'est peut-être même la plus brute de décoffrage de la sage Lucky Luke dans son ensemble. Tous les ingrédients attendus sont présents, avec ce côté plus proche des origines, avec un moins fort détournement des personnages.
Phil Defer est un desperados, de la pire espèce, qui n'est pas là pour tergiverser, il a une mission - éliminer le saloon voisin - il mènera à bien la commande.
Pour tout le respect des personnages grandioses créés par la suite, Billy the Kid a ce côté grand gamin capricieux qui le rend presque attachant, les Dalton sont plus bêtes que méchants et deviennent peu à peu des caricatures d'eux mêmes, Jesse James est un gangster presque romantique. Phil Defer a ce côté roots (au sens originel), froid, létal. Il n'en a pas moins des faiblesses qui seront exploitées par Lucky Luke qui signe un excellent album.
Dès le commencement de l'histoire, on voit que ça va sentir la poudre : un O'hara vient installer son bar juste à côté de celui d'O'Sullivan, aux pratiques douteuses. Un temps on voit cette concurrence comme une source d'innovation entre les deux tripots, elle sera de courte durée. La persévérance du dernier arrivée incite O'Sullivan de faire appels aux services de Phil Defer.
Ce début d'histoire renvoi à deux épisodes fameux développés plus tard dans la saga. Le conflit sans fin des O'Timmins et des...O'Hara dans Les Rivaux de Painful Gulch. Mais surtout l'affrontement entre Roy Bean et Bad Ticket souhaitant marcher sur ses plates bandes dans Le Juge.
Dans ces différentes aventures, les auteurs donne à Lucky Luke un rôle bien différent à chaque fois, contribuant à la belle richesses du personnage et de ses attributs de médiateurs dans les conflits.
-> Dans Les Rivaux, Lucky Luke sera parfaitement neutre, à l'initiative de la résolution du conflit mais sans prendre partie pour l'un des deux camps.
-> Dans Le Juge, Lucky Luke va un coup chez Roy Bean, un coup chez Bad Ticket, dans un rôle multi casquette très habile.
-> Dans Phil Defer, il est du côté de son pote O'hara, littéralement en duel contre le desperados.
La deuxième histoire de "Pilule" est sympathique, beaucoup plus décalée et très bien amenée sur la thématique : l'habit ne fait pas le moine ou plutôt ne pas jugez son shériff sur son apparence. Les 4 cases où apparaissent Lucky Luke - narrateur de cette histoire - font rêver. Être avec Lucky au coin du feu, à l'air libre, avec les potes, café (et brindille d'herbe!) à la bouche, à se raconter les légendes et les épopées du farwest, c'est très proche de la définition du bonheur.
Un très grand album auquel il manquera ce petit grain de folie pour rentrer dans un top 10. Il s'agit toutefois du meilleur album de Morris sans Goscinny, toute époque confondue.