L’anime de Kuragehime fût une bonne surprise, inattendue, malgré un studio qui se contente du travail minimum – souvent une adaptation du manga à la case près – et une contrainte de format obligeant de conclure l’histoire prématurément. J’attendais donc cette version papier avec une certaine impatience.
Comme prévue, ce manga commence fort, avant tout grâce à ses protagonistes haut-en-couleur : une passionnée des méduses, une dingue des Trois Royaumes, une fujoshi spécialisée dans les hommes d’un certain âge, une collectionneuse de poupées et de vêtements anciens, une obsédée des trains, et en parallèle de tout ce bestiaire, un garçon beaucoup plus « tendance » mais dont la passion pour le travestissement ne parait pas moins bizarre que celles de Tsukimi et de ses amies.
Découvrir de telles personnages dans leur environnement est un régal de drôlerie.
Cela devient moins vrai tandis que nous progressons dans l’histoire, que les protagonistes se confrontent à la « dure réalité », et que commence à apparaitre le gag récurrent consistant à transformer la bande de filles excentriques en greluches, à grand renfort de perruques, de vêtements à la mode, et de maquillage. C’est tout-de-suite moins drôle, et cette comédie y perd forcément au change. Plus nous avançons dans l’histoire, moins elle amuse. Cela reste distrayant, et ce manga peut encore compter sur quelques fulgurances comiques.
Malheureusement, Kuragehime souffre du même mal que Les Vacances de Jésus & Bouddha : ce sont deux titres profondément ancrés dans la société japonaise, et dans le cas présent, Delcourt a fait le choix d’une forte adaptation pour ne perdre son lectorat. C’est une arme à double-tranchant : trop souvent, nous sentons que les dialogues et les références ne peuvent pas correspondre à ceux d’origine, et cela en devient frustrant. Certaines blagues seraient même plutôt consternantes.
Il existe de nombreux manga qui ne peuvent pas sortir du Japon, car « trop Japonais » même pour le lecteur habitué aux manga. Cela aurait dû être le cas pour Kimengumi High School, et à la vue de la version française du manga de Kuragehime, nous ne pouvons que nous demander si celui-ci n’aurait pas dû rester dans son pays. A moins que Delcourt ait eu la main lourde sur l’adaptation ? En tout cas, de nombreux gags passent totalement à côté à cause de ça.
Tandis que nous progressons dans l’histoire, celle-ci perd de son charme des débuts, et ses défauts n’en deviennent que plus visibles. Au bout de quelques tomes, Kuragehime n’est plus que médiocre ; incompréhensible compte-tenu de ses personnages et de son potentiel de départ.