Il est un train.
Un train qui vient de nulle part et qui va on ne sait où. Il ne s'arrête ni pour prendre des passagers ni pour les déposer. C'est pourtant un train que tout le monde emprunte. Certains pour y faire un court trajet, d'autres plus long. Un train composé de wagons hétérogènes; de différentes tailles, de différentes couleurs, aux résidents tout aussi différents. Les rails sur lesquels il serpente sont tantôt droits tantôt sinueux mais semblent ne pas avoir de fin.
A l'allure où il file, ses locataires peinent à envisager ce qui les entoure et quand ils le distinguent enfin, le train les en éloigne aussitôt. Ceux-là s'extasient du moment tandis que d'autres regrettent qu'il soit déjà révolu. La plupart ignore qu'ils en sont des passagers involontaires et se laisse guider vers un terminus incertain quand d'autres choisissent de remonter vers la locomotive pour changer de voie. Certains réussissent, d'autres échouent mais jamais le train ne s'arrête, seuls ses passagers subissent les affres du temps.
Il est un temps qui file un train d'enfer.
Après des errances alcoolisées, un jeune Japonais de 48 ans nommé Hiroshi se trompe de train. La destination lui est familière et pour cause : il retourne dans son village natal. Après s'être recueilli sur la tombe de sa mère, il s'assoupit et se réveille délesté de 34 années. Hiroshi va alors essayer de comprendre pourquoi il est malheureux.
Jiro Taniguchi nous sert un voyage dans le temps initiatique où l'imaginaire pallie les carences du réel. Quartiers Lointains est une fable ingénieuse où tout prend sens dans un désordre onirique. La vie en est le cœur et les dessins magistraux ne manqueront pas de toucher ceux à qui l'âme d'enfant continue de parler la langue de la nostalgie.