« Franquin, c’est un gars qui ficherait la migraine à un I.B.M. !... »
Attention album bâtard ! Ce hors-série numéro 2 réunit trois histoires issues de trois époques bien différentes de Franquin. La première marque le passage de relai entre Jijé et Franquin pour dessiner Spirou. La deuxième est une histoire longue écrite alors que Franquin a déjà pris un peu de bouteille aux commandes de son petit groom. Enfin, la dernière, très courte, à peine deux pages, est juste une blague. Et c’est un Gaston en très grande forme qui assure l’intermède et remet un peu d’ordre dans tout ce bazar !
La première histoire, intitulée Spirou et la maison préfabriquée, est la matrice du Spirou dessiné par Franquin : Jijé commence l’histoire sur quelques planches, puis offre au jeune dessinateur de prendre le relai (à la quatrième vignette de la page huit, pour les puristes !). L’intrigue n’est pas fameuse, souvent improvisée, et rappelle plutôt un slapstick dans le genre des premiers films de Buster Keaton. Le dessin n’est pas fou, et ni Spirou ni Fantasio ne ressemblent encore à grand-chose. Mais voilà, c’est le début de tout, et cela seul mérite le coup d’œil...
Avec Radar le Robot, la deuxième histoire, c’est un Franquin aguerri qui nous revient après avoir déjà dessiné Le Tank et L’Héritage, présents dans le Hors-Série n°1. Au menu cette fois-ci : intrigue longue d’une trentaine de pages, dessin affuté, et innovations à tous les étages dans la perspective. C’est drôle, bien construit, et le savant fou exhale déjà le parfum doucement délirant des aventures de Spirou made in Franquin. C’est également la première fois qu’on mentionne que Fantasio est journaliste. Bref, malgré un scénario un peu léger, Radar Le Robot reste un très bon cru !
Enfin, la troisième intrigue, Le Homard, est une blague de Franquin à propos d’un tube de mayonnaise. Pas franchement indispensable, mais puisqu’elle est dessinée plus de dix ans après, cette double-planche permet d’apprécier tout le chemin parcouru par Franquin depuis qu’il crayonne la bouille du groom.
Et entre toutes ces histoires disparates, c’est Gaston, son chat et sa mouette dépressive qui assurent l’intermède, dans des dessins particulièrement délirants. On découvre toute l’autodérision mordante dont Franquin est capable à propos de ses propres dessins de jeunesse ... jouissif !