Mené en bateau par un pirate
Encore une histoire de pirates, moui. Oui et non. Du moins ce n’est pas une histoire de pirates comme les autres. On y retrouve certes les principaux lieux communs (abordages, île au trésor, monstre marin, cruauté sanguinaire, etc.) mais sans qu’ils soient véritablement présents. Ils ne sont que fiction dans la fiction. Racontars inventés pour plaire à un lecteur qui n’existe pas. Ou à un écrivain en manque d’inspiration. C’est la mise en abime : l’histoire racontée à l’intérieure de l’histoire et le lecteur qui se regarde dans un miroir. Voyons y un beau pied de nez adressé à tous ces adeptes de rebondissements prévisibles et autres amateurs de stéréotypes qui préfèrent leurs idées préconçues à la réalité parfois décevante.
Au delà des affabulations d’un maigre pirate qui mène en bourrique un âne pour remplir sa panse, il y a tout l’art de Baladi. Son savoir-faire n’est, je crois, plus une question à débattre. Observez la subtilité avec laquelle l’auteur joue sur les différents tableaux, les différentes temporalités sans rendre les passages de l’un à l’autre lourds ou pesants. Les planches sont blanches, aérées, et pourtant explicites. Les moyens simples, économiques et le trait sûr de lui. Un trait noir et assuré qui pourtant flotte sur la page comme l’écume sur la vague. Cette vague qui a secoué notre pauvre pirate aux quatre coins des mers, pour finalement le mener en prison où il croupit. Tout juste bon à vendre son âme pour un repas...
En bref, cette BD est un véritable éloge de la liberté, une apologie de la différence, et cela tant au niveau de la forme que du fond.
A découvrir sans attendre !