Triste réalité
A ma grande surprise, le second tome de Southern Bastards mettait une pause dans l’intrigue de Jason Aaron et Jason Latour afin de nous présenter, correctement et en détail, le coach Euless Boss ...
le 7 déc. 2016
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Comics de Jason Aaron, Chris Brunner et Jason Latour (2016)
Retour dans ce Sud américain des plus pourris avec un troisième tome de "Southern Batards" qui amorce le revers de fortune pour Euless Boss, le chef jusque-là triomphant incontesté de Craw County. C’est que Roberta arrive en ville, bien décidée à faire la lumière sur ce qui a pu arriver à son père, Earl.
Et tout l’édifice si patiemment et si fermement mis en place par Boss de s’effriter peu à peu, menaçant de s’effondrer un peu plus à chaque nouvel événement, depuis ce retour de Earl et sa volonté de contester la mainmise du coach de l’équipe des Rebs sur l’ensemble de la ville.
Depuis, tout fout le camp. Les soutiens prennent leurs distances, désertent même, et ceux qui courbaient l’échine commencent à redresser la tête. Rien ne va plus pour Euless Boss, et le vieil homme le sent. Une odeur de curée plane dans l’air vicié de ce Sud malade d’être enfermé sur lui-même. Et la bouffée d’air frais qu’apporte avec elle Roberta risque bien de balayer l’empire décadent qui ne tient plus que par sa propre inertie, bien aidée par la passivité de chacun.
"Retour au bercail" donc : un titre toutefois trompeur pour ce troisième volume du comics de Jason Aaron et Jason Latour. Il faut attendre le dernier chapitre pour voir Roberta, introduite à la fin du tome 1, réellement entrer dans l’intrigue en prenant possession de la maison de son défunt père. Entretemps, le récit fait le tour des l’univers de Euless Boss, devenu le personnage central au tome 2 et des difficultés qui se dressent, toujours plus nombreuses, devant lui.
Après avoir décrit l’ascension de leur monstre, nos auteurs s’attachent à présent à dépeindre une fin de règne dont ils mettent en lumière les signes avant-coureurs, dans ce cadre si particulier de cette Alabama nécrosée. Et pour que le panorama soit complet, nous avons même droit à diverses représentations de la religion, aussi lâches que vaines, arriérées et dégénérées à souhait.
Encore une fois, le récit passionne et prend aux tripes. Il y a quelques chose de proprement viscéral dans ce portrait d’une Amérique autant perdue pour le monde que pour elle-même. Et l’on comprend que le titre ait remporté cette année l’Eisner Awards de la meilleure série. Une récompense pour une œuvre engagée, comme le prouve une nouvelle fois la préface percutante du dessinateur Jason Latour.
Southern Bastards, à la manière d’un Rebels de Brian Wood, prend d’ailleurs une résonance particulière en cette période précise de l’histoire politique du pays. Car l’électorat conservateur américain populaire du Sud et de la Rust Belt vient de porter au pouvoir, avec Donald Trump, une figure rappelant de manière troublante Euless Boss, donnant l’impression que Craw County constitue une version miniature, racornie, des Etats-Unis.
Mais si, dans la fiction, un personnage de femme noire américaine vient pour signifier la fin d’une ère révolue, c’est tout le contraire qui nous arrive dans la réalité...
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le 7 févr. 2017
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