Étrange ouvrage que ce Secret War. Et ce de par essentiellement un point : tout une partie de l'histoire se déroule hors des planches de BD. La moitié de l'album (peut être moins, mais en temps de lecture, c'est bien la moitié) est en effet consacré à des fiches du S.H.I.E.L.D. diverses et variées : retranscriptions d'interrogatoires, fiches sur les différents protagonistes avec des annotations à la cons de Nick Fury et autres fiches en tout genre qui viennent compléter l'histoire proposée à côté.
L'autre point qui m'a étonné, mais c'est sûrement car je lis l'histoire après avoir lu des comics récents, c'est qu'une fois passée les trois premiers numéros, la série n'a plus de surprise, plus rien à raconter, tout a été annoncé avant et du coup il n'y a pas de retournements de situation et la fin nous laisse du coup un peu sur notre faim. Heureusement les concepts de base sont forts, le côté espionnage est bien retranscrit et avoir la toile de l'histoire qui se construit au fur et à mesure notamment grâce à toutes les fichiers bonus est intéressants (même si on aurait bien aimé avoir plus d'interrogatoires sous forme de BD... Là on a parfois un peu l'impression de lire un script qu'on a pas eu le temps d'illustrer). En plus, les dialogues sont biens écrits (habituel avec Bendis), même si son Spidey est un peu lourdingue, et les répercutions de l'histoire se font encore sentir aujourd'hui, que ce soit pour le statut de Nick Fury Sr., Maria Hill ou Daisy Johnson qu'on croise dans les pages du Secret Avengers de Spencer (lire Secret War m'a d'ailleurs bien éclairci sur le statut du personnage).
Ce qui est bizarre avec cette histoire, c'est qu'il y a limite plus de passion dans les documents à côté que dans les deux derniers numéros qui nous propose une baston dont on se fout un peu et où l'enjeu humain est mal géré (un côté plus début de Civil War aurait été sympa à ce niveau là)... Il y a aussi le fait qu'on ne voit jamais vraiment la guerre secrète de Fury, ce qui est un peu dommage car ça avait l'air sympa (et ça n'aide pas à s'impliquer) et le fait que du coup les nouveaux designs de costumes ne se font même pas remarqués (surtout quand on ne les voit que dans des images de baston générale en niveau de gris...)...
D'ailleurs, au niveau dessin, on est gâté avec Gabriele Dell'Otto qui livre de superbes peintures dans les pages internes. C'est vraiment très beau et ça participe à donner un ton particulier à l'histoire. Dommage toutefois qu'on ait parfois du mal à bien différencier les différents méchants impliqués, qu'il y ait des fois des petits soucis de lisibilité du même genre, et pour le coup des costumes cité plus tôt.
Bref, une histoire en demi-teinte, un concept fort, intéressant mais qui n'aboutit sur (presque) rien... On ne peut s'empêcher d'être déçu tant on sent les deux auteurs à fond dedans. Ça reste toutefois une lecture agréable et un régal pour les yeux.