Yeowoo n’a que cinq ans lorsque ses parents divorcent. Laissée derrière par une mère dont elle ignore tout, elle est bientôt abandonnée et déracinée par son père qui la confie à son père et sa sœur qui vivent à la campagne. Blessée et incomprise, Yeowoo est en colère. Sa rencontre avec sa nouvelle voisine, Paulette, va venir changer sa vie, apaiser son cœur et rompre son isolement.
La solitude suinte par tous les pores de cette histoire écrite avec grande sensibilité. Yeowoo ne voit pas la douleur des autres car elle étouffe sous la sienne. Elle ne voit pas la solitude de son grand-père, veuf et soucieux de l’avenir de sa fille qui vit encore sous son toit. Elle ne voit pas non plus la solitude de sa tante, qui vit dans un monde peuplé de poupées, attendant que le grand amour se présente à sa porte. Et elle ne voit certainement pas celle de Paulette, poule rejetée des siens pour ne pas avoir fondé de famille. Pourtant, en grandissant, l’amour maternelle que lui donne Paulette, l’aide à s’apaiser et à se construire. Ensemble, elles comblent l’absence et la manque au travers du temps passé à discuter, à veiller l’une sur l’autre, à s’aimer.
L’histoire se divise en seize chapitres qui prennent la forme d’une petite histoire ; chacune permet de voir grandir Yeowoo de ses cinq ans à ses seize ans. Cette construction en chapitres est particulièrement intéressante pour jouer avec le temps. Certaines anecdotes sont assez dures, on ne comprend pas toujours très bien pourquoi Yeowoo a été abandonnée par ses parents, pourquoi son père ne lui rend visite qu’une ou deux fois en dix ans, la laissant toujours derrière. C’est d’autant plus terrible qu’il vient présenter sa nouvelle compagne et son nouvel enfant, sans lui accorder un sourire ou un geste tendre. Mais cela contribue à l’évolution de Yeowoo et à nous la rendre plus sympathique.
Les illustrations sont de toute beauté. YunBo joue avec les couleurs et les formes pour différencier la campagne et sa nature luxuriante à la ville froide et rigide avec ses immeubles. Elle n’hésite pas à sortir des cases pour dynamiser son récit et offre un panel de personnages très divers : bien qu’essentiellement renards, ils prennent des teintes différentes et leurs visages se distinguent les uns des autres par la forme d’un museau ou la tenue des oreilles. L’ensemble donne une bande dessinée de qualité avec une identité graphique propre et une narration toute en poésie.
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