Guy Delisle est un auteur bien connu pour ses autobiographies centrées sur ses séjours à l'étranger (Chroniques de Jérusalem, Chroniques Birmanes). Si j'aime beaucoup le travail de cet auteur, je n'avais pas encore lu son premier exercice de ce type : Shenzhen.
Récit restituant 3 mois de travail dans la ville de Shenzhen, cette BD est un plongeon au cœur de la Chine de 1997. Guy Delisle séjourne en Chine dans le cadre d'un projet d'adaptation en dessin animé d'une BD française bien connue. La mission du français est de superviser le projet et de guider les animateurs tout en corrigeant les erreurs de dessin, la difficulté étant que la sous-traitance à ses limites vu les différences de langue, de culture et d'expérience en animation.
Guy Delisle semble vivre difficilement son séjour mais choisit de nous le raconter avec son fameux ton piquant qui me fait personnellement sourire.
Le regard tantôt amusé, parfois désespéré et quelques fois agaçant de l'auteur fait tout le sel de la lecture.
On suit donc l'auteur dans son train-train quotidien. Entre les particularités de son hôtel, son travail un brin ennuyeux et les difficultés rencontrées pour échanger avec la population locale, le séjour est loin d'être des plus joyeux. Pourtant, le dessinateur rend son spleen intéressant grâce à une dérision constante et de belles anecdotes qui rythment le récit.
Les petites anecdotes sur la nourriture, les réactions de ses collègues chinois et les découvertes sur la culture chinoise sont souvent délicieuses. Les errances et maladresses de l'auteur sont aussi de belles sources d'amusement.
Shenzhen est située au sud de la Chine à quelques kilomètres de Hong Kong, ce qui débouchera sur un week-end touristique aussi dépaysant qu’étrangement occidental pour Guy Delisle.
Le récit est relativement court mais traite en même temps d'une courte période de 3 mois. On ressent l'ancienneté de la BD si on la compare avec les autres récits de voyage de l'auteur. Le ton est moins marqué, les anecdotes moins travaillées et la documentation moins riche mais l'ensemble reste excellent si l'on apprécie ce genre de BD.
J'ai pas mal pensé au début à Pyongyon, son récit de voyage suivant vu que Delisle séjourne pour le même type de travail. La différence culturelle entre la Chine et la Corée du Nord et la manière dont il est accueilli dans les 2 pays font cependant que les 2 BD sont très différentes.
Le dessin de Guy Delisle se reconnaît au premier regard. Clair, se concentrant sur l'essentiel, le dessin se montre cependant très détaillé quand il s'agit de montrer des paysages (ici citadins) ou des objets. Le dessin est assez expressif et si l'ensemble manque parfois de finesse, la narration travaillée de l'auteur fait son effet et rend la lecture aussi facile que captivante.
Shenzhen est donc une jolie petite lecture, à la fois intéressante pour le regard culturel qu’elle apporte et drôle grâce au ton unique de l’auteur. Si j’ai bien aimé cette lecture, je pense qu’elle est à réserver aux personnes appréciant le travail de Guy Delisle et je recommanderai plutôt Chroniques Birmanes ou Chroniques de Jérusalem pour découvrir l’auteur.