- Combien tu paies, Petit Noble ?
- Payer ? Je t'ai rendu ta liberté !
- Je veux la moitié de tout ce que tu toucheras.
- Tu es fou !
- Moi, je finirai par sortir d'ici alors que toi, on te retrouvera écorché, cloué aux portes du palais. Donc, je suis en position de négocier une bonne prime. Qu'est-ce que t'en dis, associé ?
- << Associé >> ?
- J'ai pas de maître. C'est à prendre où à laisser.
- Foutu barbare !
- Maintenant que toi et moi, on est en affaires, tu peux m'appeler par mon nom, Petit Noble. Je me nomme Iixos.
Poker Mages !
Nicolas Jarry revient avec les éditions Soleil pour "Mages", tome 7 : « Soliman ». Une bande dessinnée qui s'articule au sein des Terres d'Arran. Un gigantesque univers composé de plusieurs sagas qui vient en parallèle se greffer autour d'une seule franchise synthétisée par des tomes indépendants avec "Elfes", "Nains", ou encore "Orcs & Gobelins". Une épopée d'héroïc fantasy fantastique d'une richesse surprenante. Avec ce septième tome, on retrouve la magie "alchimique", une des quatre voies magiques trouvant sa place auprès des deux voies directes et des deux voies indirectes qui composent le pouvoir de la sorcellerie. Pour cette aventure, on découvre "Soliman", fils bâtard et dernier héritier d'"Adalam", un alchimiste renommé au service d'un vaste empire dirigé par le Mahid Al'Farad. Soliman est un sorcier incapable qui préfère passer son temps à flâner dans les auberges enfumées du port de Nazarem. Après l'assassinat de son père, il devient le Mage officiel du seigneur et va se retrouver à devoir gérer une guerre contre un Nécromancien surpuissant. Un novice irresponsable responsable de la survie d'un pays.
Un album d'une fraicheur délectable que l'on retrouve à tous les niveaux à commencer par les deux personnages principaux. Le premier : "Soliman", un héros pas comme les autres. Un sorcier fainéant qui a renoncé à marcher sur les traces de son père suite à un traumatisme. Un trauma provoqué à la mort de son grand-frère Arius. Un puissant Mage mort à cause de la négligence de Soliman durant un combat contre un Djinn Exhalé. Arius, qui à élevé Soliman bien qu'il ne soit que son demi-frère. Ce qu'il y a de fantastique avec ce personnage, c'est qu'il tire sa force non pas d'un pouvoir qui lui serait venu de je-ne-sais où au dernier moment, mais de sa roublardise. Une arnaque en règle ! Une partie de poker très amusante. Une approche osée qui contraste avec ce que l'on a l'habitude de lire autour des Terres d'Arran, ce qui n'est pas pour me déplaire. Soliman est accompagné de l'autre star de cet album : "Iixos". Un barbare dur en affaires qui ne plaisante pas. Aussi brutal qu'impitoyable et arriviste il fait figure d'un charisme évident. Il surnomme Soliman "Petit Noble". Les deux hommes forment un duo d'escros percutant qui passe leur temps à se chamailler et se menacer. Un binôme qui fait des étincelles et auquel on s'attache. Ils vont devoir s'associer pour affronter le Nécromancien Shez'Er'Alazarr. Un adversaire inquiétant, capable des pires sortilèges. Soliman et l'ensemble des autres Mages détestent les Nécromanciens avec leur pouvoir perfide.
Le récit explore avec ingéniosité la corruption politique avec les vices et les roublardises du palais. Des connivences de l'ombre savamment illustrée pour une narration qui ne manque pas d'ingéniosité avec le Mahid Al'Farad et la princesse Azilaya qui sont tous deux des belles pourritures. Les dialogues sont percutants et souvent drôles. Les insultes sont hilarantes : « Sable Noir ! Putain de mère des déserts ! Les fils de Fennec ! Je vous retrouverai et je vous crèverai, fils de hyène en chaleur, suceurs de chameaux ! Branleurs de chèvres ! ». Les péripéties sont originales. Le combat dans la cellule contre les assassins "Iraguen", qui sont considérés comme les pires calamités de l'empire est autant amusant que divertissant. Durant le combat, Soliman, de peur, réagis en faisant des sorts n'importe comment, faisant apparaître des papillons de lumières. La fausse attaque des dragons de nuages est un moment très efficace de cet album. Un passage important qui traduit la roublardise de notre héros. En effet, il n'hésite pas à créer une menace pour la détruire juste après par des grands effets afin de faire croire en son talent pour mieux être épargné de sa tentative de fuite. Le final tient étonnamment ses promesses ! Une confrontation importante contre un Nécromancien aux pouvoirs conséquents. Un duel implacable où le duo pour essayer de ressortir victorieux du combat va user du seul talent qu'il dispose, à savoir : la ruse et non la magie.
Les dessins d'Andrea Cuneo accompagnés des couleurs de J. Nanjan sont superbes ! Les ruelles du royaume exotique de Nazarem sont réussi. Une belle conception de décors. Que ce soit les tripots jusqu'au château du roi, c'est une confection qui tape à l'œil et fait plus vraie que nature. Les personnages ont des traits sérieux et taciturnes qui cadrent avec la conduite implacable de cet album auquel se greffe un humour savamment dilué qui n'est appuyé par aucune légèreté graphique. On se régale de la texture de fond avec une ambiance chargée en gravité qui pour autant nous fait rire. Ce n'est jamais facile de concilier de l'humour sur un enjeu grave sans y perdre en tension ni en lourdeur. Avec ce septième tome, c'est une mission accomplie. Un dosage parfait. Les vignettes sont percutantes lors des confrontations magiques qui à défaut d'être irréprochables, offrent des moments délectables. Les sorts magiques impressionnent malgré le manque de talent évident de Soliman. Les pentacles magiques sont superbes. Ils sont illustrés à travers des plans habiles.
CONCLUSION :
"Mages", tome 7 : « Soliman », de Nicolas Jarry, est un album rafraichissant qui régale le lecteur de ses nombreuses prises de risque. Des changements bienvenus au service d'un récit mouvementé qui laisse la part belle à des confrontations où la roublardise et la sorcellerie se conjuguent. Une lecture animée pour le lecteur qui affiche tout du long un sourire délectable.
Un duo de personnages que j'espère retrouver !
- Tu veux m'égorger avec quoi ? Tes mains de pucelle ??
- T'en fais pas pour ça, ferme juste les yeux et je m'occupe du reste.
- Je sais pas ce qui m'empêhce de t'arracher les yeux et la langue, et de te farcir le croupion avec !
- Si tu fais ça, le Mahid te fera éplucher comme une grosse mangue juteuse. Les sauvages de ton espèce n'ont pas loi à Nazarem !