Il était une (deuxième) fois dans l'Ouest
Vous pensez que tout a déjà été dit et écrit sur le Far West? Vous vous trompez. Avec "Texas Cowboys", dont le tome 2 vient de paraître, Bonhomme et Trondheim nous replongent avec délice dans la poussière et les bars enfumés du mythique Ouest américain, sans jamais donner une impression de déjà vu ou déjà lu. Capable du pire comme du meilleur, le scénariste Trondheim est ici au sommet de sa forme: il semble s’amuser comme un petit fou à imaginer des histoires parfois rocambolesques, mais toujours pleines de malice et de fantaisie, parvenant même à insérer de temps en temps une touche d’émotion. Du grand art. Pour ne rien gâcher, le scénario de Trondheim est magnifié par le dessin quasiment parfait de Bonhomme, qui prouve une nouvelle fois qu’il est bel et bien l’un des dessinateurs de BD les plus talentueux du moment. L’auteur d’Esteban semble décidément à l’aise dans tous les univers. L’un des points forts de "Texas Cowboys", c’est son petit format et son découpage en chroniques. La BD se présente sous forme d’un recueil d’histoires courtes, chacune d’entre elles ayant une couverture séparée. Mais en réalité, tout se tient et forme un ensemble cohérent, ce dont on ne se rend pas toujours compte en lisant la prépublication des différents épisodes dans le Journal de Spirou. Comme dans le tome 1, paru il y a deux ans, le héros principal de ce deuxième tome est le journaliste de Boston Harvey Drinkwater. Quelques années après son premier passage, il est de retour au Texas dans l’espoir d’y puiser l’inspiration pour des nouvelles chroniques sur Fort Worth, le coin le plus pourri et le plus dangereux de l’Ouest américain. Le plus passionnant aussi, comme le prouve sa rencontre avec le mythique marshal Wyatt Earp. Mais à la différence du premier épisode, Drinkwater est désormais un personnage connu dans le Far West, non seulement parce que ses articles y rencontrent un certain succès mais aussi parce que certains hors-la-loi ont un oeuf à peler avec lui depuis son premier séjour au Texas. Du coup, un comité d’accueil l’attend dès sa sortie du train. "Texas Cowboys", c’est aussi et surtout une magnifique galerie de personnages. Mention spéciale à quatre d’entre eux: tout d’abord, on ne peut qu’être séduit par les deux seuls personnages féminins du livre, Madame Cooper et Sophia, toutes deux magnifiquement dessinées par ce virtuose de Matthieu Bonhomme. Puis il y a Butch la framboise, un fanfaron qui passe son temps à provoquer des bagarres dans les saloons, en espérant qu’un jour Drinkwater lui consacrera un article. Et puis enfin, il y a Woodham, un ancien soldat sudiste dont la principale occupation est de chercher des âmes généreuses disposées à lui payer un verre (ou deux) en échange d’un récit sur la manière dont il a perdu son bras. Ce qui nous vaut cinq versions différentes de sa mésaventure, sans qu’on sache si l’une d’entre elles est vraie ou pas. Désopilant. "Texas Cowboys" est incontestablement un des coups de coeur de cette rentrée.