Tough reprend le schéma classique du manga shonen de baston.
Le héros veut devenir plus fort, il affronte des ennemis de plus en plus forts pour se dépasser jusqu'à arriver à un boss contre lequel il butera sévèrement, avant d'enchainer vers un autre boss qu'il ne pourra atteindre qu'en affrontant une autre série d'adversaires, et le tout culminera jusqu'à un boss de fin dont le combat représentera l'aboutissement de tous les efforts du héros.
Et bien entendu, si la série démarrera par des affrontements alternant réalisme et fantaisie, elle virera vers la fin dans la fantaisie totale.
Mais est-il pertinent de juger Tough sur la structure de son histoire ? Je n'en suis pas certain.
Car au delà de sa répétitivité, le manga aborde bon nombre de thématiques liées au monde des arts martiaux.
En premier lieu, la force. A quoi sert-elle ? Pourquoi les combattants de Tough veulent-ils devenir les plus forts du monde ? L'intelligence de l'auteur est de montrer que chacun a ses raisons de vouer sa vie au combat : Amour, haine, quête d'identité, tous les ennemis dans Tough, même les pires salopards, parviennent à devenir touchants tant leur humanité parvient à transcender leur apparente inhumanité. Les personnages ayant eu droit au meilleur traitement à ce niveau-là sont clairement 'Iron' Kiba et Garcia. Des hommes de tous horizons brisés par la vie qui trouvent dans le combat la manière de trouver un sens à leur existence.
Mais c'est aussi un manga sur la transmission, sur le lien entre un père et son fils. Kiichi est censé hériter des techniques ancestrales de son père et doit donc continuellement se surpasser pour répondre aux attentes de ce dernier. Leur liaison ne se fera d'ailleurs pas sans heurts, il y aura des conflits, de l’incompréhension mutuelle, des coups même, mais toujours cet amour filiale qui ne se dit pas, mais se ressent à chaque technique apprise par le père au fils que ce dernier appliquer en combat. L'auteur met ainsi en parallèle l'héritage des arts-martiaux et l'héritage familial, en montrant que les deux sont intimement liés. Chose intéressante, le combat contre le boss final renverse le schéma classique du fils dépassant son père, le substituant à un ultime combat du père pour sauver son fils. Mais de manière générale, toute la dernière partie du manga rappelle le conflit Kenshiro-Raoh-Toki dans Hokuto no Ken.
Les combats de Tough sont très impressionnants. On a certes des éléments fantaisistes comme des coups qui tuent en 5 ans ou des combattants capables de faire faire à leur colonne vertébrale une rotation à 180°, mais l'auteur fait la part belle aux clés et aux projections. Dans un affrontement de Tough, un déchirement des tissus aux avants-bras représente un sérieux handicap, d'ailleurs à beaucoup de moments sont mises en avant les séquelles des blessures accumulées en combat, qu'elles soient physiques ou psychologiques.
Car l'auteur parle aussi beaucoup de meurtre dans son œuvre. Suivant la voie de son père, Kiichi refuse d'employer les techniques ancestrales de sa famille pour tuer, mais simplement pour mettre hors de combat son adversaire, ce qui va à l'encontre de l'esprit des arts-martiaux qui sont censés être des outils pour tuer. La question devient alors jusqu'où le héros sera-t-il capable d'aller sans être forcé d'ôter la vie à son adversaire pour gagner.
Tough est un bon manga, qui arrive autant à proposer des combats dantesques qu'une histoire intéressante à suivre. Et ce n'est pas chose commune.