Pour les adeptes de Chine dominante dans une réalité parallèle...
Uchronie(s) est un projet ambitieux né il y a quelques années. Eric Corbeyran avait scénarisé trois trilogies parallèles New York, New Byzance et New Harlem. Elles nous présentaient trois réalités uchroniques. La première nous plongeait dans le New York que nous connaissons. La seconde nous immergeait dans un New York qui serait la conséquence de la prise de pouvoir de l’Islam à l’échelle mondiale. Enfin, la dernière nous faisait découvrir une Amérique dominée par les descendants des Black Panthers. Un dixième album mettait en lien ses trois univers dans un dénouement remarquable. J’avais donc été surpris lorsque j’avais vu apparaître dans les rayons trois nouvelles suites : New Beijing, New Moscow et New Delhi. Les premiers tomes étaient de qualité inégale. Néanmoins, ma curiosité n’a eu aucun mal à me décider à m’offrir le deuxième épisode de « New Beijing, sujet de ma critique du jour. Edité chez Glénat, cet opus est sorti le cinq octobre dernier. Aurélien Morinière se voit confier les dessins.
Le site www.fnac.com propose le résumé suivant de cet album : « En cavale, Zack et Ludmilla tentent vaille que vaille de survivre dans l’oppressante New Beijing. De leur côté, Charles et Veronika Kosinski sont en liberté surveillée. Les autorités chinoises, qui les emploient de force, sont intriguées par les visites récurrentes d’intrus qui se volatilisent comme par magie. Dans leur obsession du contrôle, elles espèrent bien que le couple saura apporter des réponses. Corbeyran réédite la recette du succès d’Uchronie[s] avec ces nouvelles réalités parallèles aux destins qui s’entrecroisent »
Le premier acte de cette nouvelle aventure ne m’avait pas complètement conquis. Je n’y avais pas retrouvé la magie qu’avaient générée les trilogies originales. Peut-être était-ce dû à l’absence d’effet surprise ? En effet, le fait que des personnes puissent passer d’une réalité à une autre est maintenant considérer comme acquis. Ce n’était évidemment pas aussi clair dans la première décalogie. J’avais donc ressenti une difficulté pour le scénario à relancer la machine. L’intrigue prenait du temps à trouver son souffle et mon intérêt de lecteur n’avait pas été attisé de manière très intense. J’espérais que tout cela s’emballe un petit peu avec ce deuxième tome.
L’intrigue fait ici cohabiter des personnages issus des trois réalités. En effet, deux personnes ici de New Delhi apparaissent dans l’histoire et Ludimilla est incontestablement originaire de New Moscow. Ces interactions font incontestablement partie du charme de la saga. Elles sont ici assez décevantes. Si on met de côté les toutes dernières pages, cet aspect est sous-exploité. J’avais aisément accepté que le premier tome serve à donner vie à l’univers de New Beijing. Je pensais que ce second tome verrait naître un changement de braquet. Ce n’est pas le cas. Je trouve dommage que l’intérêt soit vraiment lancé à une dizaine de pages du dénouement de l’épisode. Les trois premiers quarts sont bien moins intéressants.
Cet album manque d’enjeu d’ampleur. La narration consacre énormément de place à l’évasion de Zack et Ludmilla. On suit leurs pérégrinations pour échapper aux forces de l’ordre. Il n’y a rien de novateur et je regrette que cette chasse à l’homme ne s’avère pas aussi original que le concept scénaristique de la série. A l’opposé l’incarcération de Charles et Veronika est plus intéressante. Leurs recherches forcées recentrent notre attention autour de la matière noire et des différentes réalités. J’ai regretté que ce pan de l’histoire n’occupe pas une place plus importante. La fuite de Zack, trop diluée à mon goût, empêche la densité narrative d’augmenter et de générer ainsi un véritable attrait pour le lecteur.
Les dessins d’Aurélien Morinière ne m’avaient pas conquis lors de ma lecture du premier tome. Je ne peux pas dire que ce second contact ait fondamentalement changé mes sentiments à l’égard de son style. Le trait est appliqué mais manque, à mes yeux, de personnalité. Les illustrations se contentent d’accompagner le texte sans jamais le sublimer. Ils ne génèrent pas d’atmosphère oppressante, envoutante ou au minimum dépaysante. Les couleurs de Johann Corgié sont assez ternes. Néanmoins, je trouve que cette optique colle assez bien au quotidien de la vie à New Beijing.
Au final, ce second acte s’inscrit dans la continuité du précédent. L’histoire n’est pas désagréable mais manque d’ampleur. La narration manque de densité. En refermant l’album, j’ai enfin le sentiment que l’histoire démarre. Je pense que les deux premiers tomes auraient pu être condensés en un sens. Cela aurait rendu la lecture plus intense et prenante. Il ne me reste donc plus qu’à espérer que le dénouement de la trilogie marque un réel changement de braquet qui saura satisfaire pleinement mes attentes. Mais cela est une autre histoire…