La papesse du style « gros nez » récidive avec un nouvel album autobiographique, consacré, vous l'avez compris, à ses parents, et notamment à son père, personnage qui avait tendance à prendre toute la place. Un opus aux couleurs joyeusement pétaradantes, par moments quasi-documentaire sur les « 30 Glorieuses », avec un couple typique de l'époque : lui, riche patron, ne lève pas le petit doigt à la maison, laissant son épouse dévouée assurer à tous les niveaux et en toutes circonstances au sein du foyer.
On n'envie pas ce père à l'auteure : grincheux, autoritaire, cassant, imperméable à la culture, ne s'intéressant pas vraiment à ses trois enfants, aussi délicat et chaleureux qu'un rouleau de fil de fer barbelé ! Ne citons qu'un épisode, pour vous laisser découvrir le reste : retour des vacances, le petit frère est malade, le père ne veut pas arrêter la voiture, le petit frère en est réduit à vomir dans le bac des hamsters, qu'il a auparavant mis à l'abri dans ses mains.
Ainsi, l'âge adulte et le départ de la maison seront une vraie libération pour Florence Cestac, dont l’œuvre ne suscitera ensuite aucun intérêt de la part du paterfamilias. Ce n'est qu'in extremis que celui-ci exprimera un peu d'humanité, remerciant sa fille d'être venue le voir à l'hôpital, quelques heures avant qu'il ne pousse son dernier soupir (son dernier râle ?). C'est à la fois grotesque et touchant, dramatique et drôle. Ce pourrait être plombant ; c'est, une fois de plus, irrésistible.