Casting de choix. Scott Snyder, Charles Soule et Giuseppe Camuncoli s’associent à la faveur d’une série prometteuse intitulée Undiscovered Country. L’argument en est simple : une expédition formée par les empires euro-africain et panasiatique se rend aux États-Unis, en lockdown depuis plus de trente ans, dans l’espoir de mettre la main sur un traitement permettant d’annihiler la pandémie qui décime leur population…


« Nous sommes sur le point de pénétrer dans une nation perdue, un territoire avec lequel il n’y a eu aucune communication depuis trente ans. » Faisant face à une pandémie menaçant l’espèce humaine, l’Alliance euro-africaine et la Zone de prospérité panasiatique, d’habitude rivales, s’unissent pour envoyer une expédition scientifique aux États-Unis. L’ancien gendarme du monde s’est complètement confiné il y a plus de trois décennies. Personne ne sait précisément ce qu’il reste de l’ancienne civilisation américaine, de ses modes de gouvernance, de ses métropoles ou de son tissu industriel. Mais les deux empires se trouvent au bord du précipice sanitaire et un message d’espoir leur est parvenu de l’autre côté de l’Atlantique : il existerait un remède à l’azur et les Américains sont prêts à le partager.


L’azur, c’est un virus particulièrement contagieux et virulent. On apprend au détour d’une vignette que son taux de reproduction est élevé et que sa létalité avoisine les 80%. Son traitement aéroporté, consistant à larguer un gaz indéterminé sur des clusters, génère quelques doutes : « On dit que c’est du poison. Pour que le gouvernement tue tous les malades avant qu’ils puissent répandre l’azur. » Les effets de la maladie ne sont aperçus que brièvement : une dégradation de l’état général, de la fièvre, probablement des myalgies, des écoulements bleus par les yeux ou la bouche et, enfin, la mort. Le docteur Charlotte Graves, épidémiologiste, cherche à mettre en place un palliatif contre l’avis des autorités. Cela n’empêche pas ces dernières de la recruter pour rejoindre les États-Unis, au même titre que le docteur Ace Kenyatta, spécialiste de la société américaine ou Valentina Sandoval, journaliste-documentariste. Le colonel Pavel Bukowski les accompagne, ainsi que le major Daniel Graves, le frère de Charlotte, un paria qui a failli provoquer une guerre mondiale en infiltrant les États-Unis après leur scellage. Il vit désormais dans « des tentes infectes au milieu de nulle part », « traqué, la tête mise à prix », « banni de tous les endroits potables de la Zone et de l’Alliance ».


Ce qu’ils vont découvrir aux États-Unis a de quoi les sidérer : derrière les tempêtes de poussière, ils vont rencontrer des populations hostiles se déplaçant sur le dos d’animaux génétiquement modifiés et carnivores. Des individus sous la coupe d’un Maître de la destinée bien décidé à trouver la porte qui lui permettra de suivre la spirale et de contenter Aurora (sans que ces concepts ne soient clairement établis). Ce n’est pas tout : cachés dans des grottes se trouvent ceux qui forment « la minorité silencieuse », placée sous l’égide de l’Oncle Sam, qui croit en une prophétie impliquant les Graves et censée sauver l’Amérique, divisée en zones tribales et soumise à une sorte de dilatation temporelle. Vous l’aurez compris, le mystère est épais et les éléments de cette mythologie ne sont éventés que très partiellement. Les planches très colorées, l’inventivité de l’univers créé et les bonds temporels font de ce récit à mi-chemin du fantasy et de la science-fiction une œuvre engageante, pop et au souffle appréciable.


Ce premier tome d’Undiscovered Country est prometteur : graphiquement réussi, choral, il laisse toutes les trames initiées ouvertes tout en proposant un récit rythmé et inventif. On ignore encore tout de l’implication des parents de Charlotte et Daniel, mais aussi d’Aurora, dans leur venue aux États-Unis. On ne sait pas où vont mener les accords tacites passés par le major Graves, ni pourquoi cet équipage plutôt instable a été sélectionné pour mener à bien l’expédition. Quelques réserves tout de même : la caractérisation des personnages apparaît insuffisante, des incohérences manifestes se glissent çà et là (Charlotte enchaînée dans une case et libérée dans l’autre, Daniel ne prenant pas une ride lors de son premier voyage aux États-Unis) et le discours sur l’Amérique et la liberté est, au mieux, encore en construction.


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le 28 janv. 2021

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