Les autobiographies en BD, ça ne date pas d'hier. Depuis plus de quinze ans, des auteurs comme Guy Delisle, Lewis Trondheim, Pénélope Bagieu ou bien Boulet aiment beaucoup se mettre en scène dans leur quotidien, du plus banale au plus atypique, comme dans Perspolis, de Marjane Satrapi. Mais quand Mana Neyestani, un dessinateur de presse jeunesse iranien, est victime d'un cercle vicieux à cause d'un malentendu, l'autobiographie prend une autre tournure. Publié en 2012, Une métamorphose iranienne raconte les déboires de cet auteur malchanceux.
Scénario : Tout a commencé avec un cafard. En 2005, à cause du dessin d'un insecte clamant une expression d'origine azérie, un véritable souffle de révolte s'empare de cette minorité éthnique d'Iran. Le dessinateur de cette innocente histoire destinée à le jeunesse est emprisonné par le gouvernement iranien sans chef d'accusation. Après deux mois d'interrogatoire plus que désagréable, il est libéré provisoirement et en profite pour fuir son pays. Mais les ennuis ne s'arrêtent pas là... Grâce à une mise en scène des plus ingénieuse et efficace et à une objectivité totale dans ce qu'il raconte, Neyestani nous propose un scénario d'une force incroyable. On est scotché de bout en bout par ses mésaventures, où, loin de dénoncer ses bourreaux, l'auteur ne fait qu'exposer les faits tels qu'ils se sont passés, rien de plus.
Dessin : Des cases en noir et blanc foisonnantes de petits traits, un peu à la Robert Crumb. En plus de renforcer la noirceur du récit, le trait du dessinateur nous permet de mieux nous identifier à lui, et d'être au plus près du drame qu'il vit.
Pour : Les visages des nombreux personnages que rencontre Mana dans son périple sont tous aussi bien caricaturés les uns que les autres, ce qui fait beaucoup penser à des vrai dessin de presse. Mention spéciale à Maleki, le policier chargé de l'interrogatoire de l'auteur, qui écope d'un visage machiavélique terrifiant.
Contre : La fin de l'histoire est racontée en deux pages écrites, en guise d'épilogue. On aurait bien aimé que cette dernière partie soit un peu plus développée, d'une manière ou d'une autre.
Pour conclure : Ce qu'à vécu Mana Neyestani est tout bonnement incroyable, et la manière dont l'histoire est racontée donne à la BD une forte personnalité. La descente aux enfers de l'auteur est trépidante. On est pas loin du chef-d'oeuvre.