J’ai beaucoup aimé la façon dont Wajdi est représenté. Son introspection, ses silences, ses réactions inattendues et déconcertantes, tout tend à le rendre aussi attachant que crédible. Le portrait de la famille d’accueil est à l’inverse trop caricatural. Des bourgeois qui ont envie de se rendre « utiles », qui semblent surtout vouloir renvoyer l’image d’humanistes philanthropes, ravis de recueillir des compliments sur leur démarche mais finalement bien peu ravis d’accueillir un nouvel arrivant dans leur foyer. Tout ça parce que Wajdi n’est pas un enfant « comme les autres », un enfant sans problème, un enfant qui va forcément être conscient et reconnaissant de leur bonté. Aucune volonté de le comprendre, aucune volonté de lui venir en aide, la condamnation de ses actes au fil de l’album ne cesse d’aller crescendo, jusqu’au point de rupture.
C’est dommage parce ça manque de finesse. Le trait est forcé, il ne laisse pas de place à un regard plus mesuré, plus compréhensif, alors que n’importe quel adulte serait à même de se rendre compte que l’adaptation du petit garçon va être longue, difficile et douloureuse. Sans doute est-ce là un ressort scénaristique qui servira dans le second tome pour remettre les sentiments de chacun « dans le bon sens ». Mais la ficelle est grosse et gâche quelque peu le plaisir de suivre l’intrigue.
Niveau dessin c’est toujours un bonheur de retrouver la patte tout en douceur d’Arno Monin, son jeu sur les couleurs et la lumière, l’expressivité de ses personnages. Son trait se reconnaît du premier coup d’œil et c’est une qualité devenue trop rare pour ne pas être soulignée.
Une lecture en demi-teinte mais le bilan définitif concernant ce diptyque ne pourra être fait qu’après la découverte du second tome.