Et pourtant c'est la débandade
Detestable que ce petit personnage : riche, Don Juan, macho et obsédé sexuel. En rêgle général cela ne me dérange pas, mais là l'humour reste trop porté sur des blagues sexistes déjà entendues de...
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le 27 avr. 2014
Vivre à côté de la frontière suisse me permet de faire parfois de nouvelles rencontres culturelles, à l’image du Siècle d’Emma, de Fanny Vaucher et Eric Burnand, saga familiale et chronique de la Suisse du XXe siècle. Chaleureusement recommandé à tous les lecteurs francophones.
Avec le Wolfgang de Claude Gaille et Carlo Trinco, voici une nouvelle découverte suisse de plus, même si la série a eu droit à une édition française par Glénat en 1996. Cette série de strips a été publiée dans le quotidien Le Matin dans les années 1990.
Wolfgang est un loup un peu mondain, peu avare de bons mots et de conseils, n’hésitant jamais à commenter son entourage et le monde qui l’entoure. Les strips se passent dans cette société suisse des années 1990, bien que toujours contemporaine, avec quelques exceptions pour des fantaisies qui peuvent se passer à d’autres époques ou bien quand le personnage revêt d’autres vêtements que ceux habituels (un seyant nœud papillon).
Le trait rond et cartoon du dessinateur Carlos Trinco est une belle réussite, à l’élégance qui se rapproche du ton employé. Ses personnages féminins ne manquent pas de formes, comme les aime Wolfgang, qu’il anime avec malice. Même si l’humour est avant tout écrit, et pourrait même se passer de visuels, certains gags n’en sont que meilleurs avec la représentation du dessinateur.
Certaines répliques font mouche, d’autant plus quand elles égratignent Wolfgang ou se révèlent perspicaces sur le monde.
«[dans un lit, une femme devant notre loup médusé et inquiet] Les hommes d’un certain âge font toujours mieux l’amour ! De peur que ce ne soit la dernière ! »
« En amour c’est les grands mot avant… Les petits mots pendant… Et les gros mots après ! »
« - Il paraît que l’on vit de plus en plus vieux.
- On ferait mieux de vivre plus jeune ! »
Toute en retenue suisse (quitte à user de clichés), Wolfgang reste le plus souvent imperturbable, usant de son flegme. Mais s’il y a bien un domaine qui le fait frémir, ce sont les femmes. Et de ce point de vue l’humour employé apparaît de nos jours bien plus problématique.
Je me barricade de précautions, car après tout le recueil découvert, C’est dans la poche (dont il n’existe aucune information sur le web, c’est fou), avec une image de braguette, pourrait ne pas constituer l’échantillon le plus représentatif du travail de Claude Gaille et Carlo Trinco. Mais quelques gags retrouvés sur Internet démontrent bien qu’il s’agit d’un des ingrédients les plus importants du ton de la série.
Car que Wolfgang soit amoureux des jolies filles, comment lui en vouloir. Le personnage est un coureur de jupons, peu fidèle, pourquoi pas. Cependant certaines des affirmations ne sont pas loin de frôler la misogynie.
« [A son fils, devant une plage remplie de jeunes filles] Un jour, tout ceci t’appartiendra »
Dans un gag qui devait être contemporain de la mort de Lady Di
« Brave Lady Di. Elle n’a rien révélée de nos aventures ! »
« -Depuis quand Brigitte Bardot se bat-elle pour les animaux ?
- Depuis que les hommes ne se battent plus pour elle ! »
«- Mais elle n’a que 20 ans !
- Je ne lui en demande pas plus. »
« Pire qu’une traversée en solitaire… Une traversée en couple [sur une barque avec une femme qui n’arrête pas de parler] »
Wolfgang apparaît donc comme cet homme à femmes mondain, à l’impertinence qui pouvait faire sens à l’époque, mais qu’il est difficile maintenant de ne pas lire comme un humour machiste un peu indélicat. Où les femmes sont des proies et sont considérées comme des objets sexuels, bien plus souvent qu’elles ne rendent la monnaie de sa pièce à Wolfgang.
Faut-il voir une vision caustique d’un certain élitisme mondain ? Difficile à dire, car Wolfgang est bien plus souvent présenté comme ayant le beau rôle, peu souvent tourné en ridicule. Certains de ses aphorismes font sens et veulent l’ériger en philosophe des temps modernes et quotidiens.
Mais c’est peut-être ça de découvrir les créations culturelles de la Suisse sans bien connaître le pays, son humour ou ce quotidien Le Matin. Je prends le risque de mal comprendre ce Wolfgang, amusant dans ce qu’il a de meilleur, plus problématique pour ses relations avec les femmes. Si des Suisses passent par là, qu’ils m’éclairent, merci.
Créée
le 28 mai 2024
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