Le second tome de la trilogie africaine d'Alain Brézault et de Jean-Denis Pendanx, Les Corruptibles, continue d'évoluer en circonvolutions vagues par manque de caractérisation des protagonistes impliqués : le polar tendu là avance à tâtons derrière
une belle dynamique formelle,
mettant enfin la lumière sur le duo principal, mais ne captive toujours pas : ne parvient pas à titiller les méninges du lecteur laissé en mode passif.
Touches de sorcellerie autour d'un intriguant vieux sage musulman, massacre barbare et organisé d'un village entier, trafic de diamants, magouilles immobilières et détournements de fonds : les embrouilles se multiplient sur la piste de l'inspecteur Yapo qui va bientôt se confronter aux huiles du régime. L'avantage de ce volume sur l'opus précédent, c'est qu'enfin on s'attache à un personnage, que c'est avec lui qu'on évolue et qu'on avance dans l'intrigue : l'inspecteur y est déterminé, sympathique derrière son éternelle mauvaise humeur, intelligent, foutrement honnête et courageux. Son adjoint, Shérif, offre agréablement le pendant dérisoire du duo, un poil inculte, joueur, zélé mais diablement nigaud et obsédé. A travers divers décors qui font la visite cosmopolite de ce composite d'une Afrique française post-coloniale, l'on commence à se dépayser doucement, et malgré la persistance de certains clichés,
le récit s'affirme en une forme plus assurée
et plus concentrée. Infiniment plus nette.
Le plaisir du dessin de Jean-Denis Pendanx est le même : chatoyant et caricatural, vif au service d'un montage dynamique. Creusant enfin l'intrigue et ses protagonistes, Alain Brézault fait résistance : laisse place à plus d'imaginaire chez son lecteur et, sans encore convaincre ou intriguer à point, saisit mieux les enjeux humains de son récit. Avec de nombreux Zig Zag, le coeur de la trilogie trouve son rythme autour d'un
amusant duo
et la peinture comique offre enfin le recul nécessaire au divertissement léger.