Après le chef-d'œuvre Skyfall, que pouvait-on attendre d'un 24ème film, le quatrième issu du reboot avec Daniel Craig ? Presque dix ans après Casino Royale, la saga s'est métamorphosée, passant d'origin story romantique à une tragédie shakespearienne enflammée en passant par actioner bourrin sans scénar' (trop) inspiré par les Jason Bourne. Avec Spectre, la saga réitère les tares inhérentes à son long parcours : elle stagne.
Avec le retour de Sam Mendes derrière la caméra, dont la patte sophistiquée et le talent de storytelling avaient presque transformé Skyfall en un film d'auteur (à prendre avec des pincettes), on était tout de même en droit de s'attendre à une suite aussi envolée, visuellement époustouflante et scénaristiquement inventive. Sauf que les limites ont été atteintes et ce nouveau volet n'apportera rien de plus, aussi bien au niveau des décors, des personnages, de l'intrigue et de ses enjeux, un épisode laborieux qui peine à être vraiment dépaysant et dynamique.
Les panoramas hallucinants du précédent volet ? Disparus. Les audaces visuelles ? Envolées, si ce n'est pour un sympathique plan-séquence en début de bobine. Le scénario malin alliant thriller machiavélique et part d'ombre personnelle du héros ? De retour mais de manière grotesque, en faisant par ailleurs réapparaitre un grand méchant iconique de la saga, le balafré Blofeld, ici campé par un Christoph Waltz dans une totale parodie de lui-même.
Aux côtés de Craig, qui semble légèrement fatigué du rôle, la fadasse Léa Seydoux, fidèle à elle-même en glaciale casse-bonbons indépendante, et un Ralph Fiennes dealant avec son coup de vieux. On notera également un caméo dispensable de Monica Bellucci et l'omniprésent Dave Bautista en homme de main patibulaire.
Comme une version over the top maladroite et brouillonne de la saga, avec le quota des charges respecté à la lettre, Spectre échoue à demeurer mémorable et ce en dépit de cette bataille interne entre le MI-5 et un jeune agent arriviste visant à dissoudre le service 00, jugé obsolète. Une bonne idée qui aurait pu être au centre d'une péripétie inédite hélas noyée dans des sous-intrigues mal torchées et une identité visuelle anecdotique. Reste du film un bon blockbuster avec sa poignée de morceaux de bravoure réussis. Il est temps d'arrêter.