Si vous lisez cette critique c'est que probablement, je suis votre éclaireur au premier degré, ou indirectement par transitivité de l'éclairement. Un éclaireur, c'est ce petit gars à cheval dans age of empires qui vous rapporte des points en explorant la map, c'est celui qui marche au devant de l'armée, bref c'est celui qui débroussaille le terrain pour ses pairs.
C'est ce que j'ai fait avec Spectre et le verdict est limpide : par pitié, PAR PITIE n'allez pas le voir. Bien sûr, ça ne vous coutera rien si vous avez déjà la carte illimitée, mais du temps et des neurones brûlés sont déjà quelque-chose de perdu.
Qu'y a-t-il dans ce film qui me permette d'être aussi catégorique? Commençons par le positif : un Daniel Craig impeccable, écrasant de stature et de charisme même s'il n'est pas tant que ça mis en valeur par la réalisation. Toujours alcoolo de surcroît, ce qui maintient un peu d'équivoque dans son personnage. De très belles scènes d'action, notamment en hélicoptère au début, des course-poursuites dans un bâtiment vide, et il est globalement de très bonne facture. Des plans séquences solides, quelques travelling burnés, un choix de teintes délavées (bleach) intéressant. Du costaud, du Sammo Mendes de la police de Broccoli.
Mais la grosse faiblesse du film, et sur laquelle on attend un minimum un James Bond plus que d'autres franchises, c'est le scénario. Tous les clichés de la saga y sont repris religieusement : le gentil qui n'arrive pas à tuer le méchant quand il en a l'occasion, la base high tech du méchant en plein milieu d'un endroit inatteignable, l'évasion en bateau d'un immeuble qui va exploser, James bond qui se bat à la porte d'un véhicule aéroporté (un hélicoptère ici), La petite souris qui donne la clé de l'énigme sur laquelle planche james depuis un moment et la girl a qui JB arrive à donner un objet alors qu'il a les mains attachées, le tout sous le regard du méchant évidemment mais je ne vais pas continuer à les égrener : je vous renvoie vers cette critique : http://www.senscritique.com/film/Spectre/critique/26482096 qui énumère très bien les multiples clins d'oeil.
Puis on se heurte à toutes les invraisemblances dont pas mal concernent le personnage de Léa Seydoux tiens. Son nom qui est un affreux clin d'oeil, les motivations de son personnage à suivre James Bond qui sont ridicules (et mal exprimées), le I love you le plus gênant depuis l'expiration de Marion Cotillard, l'application à rouler du Q pendant que le méchant fait visiter ses installations high-tech, et une séparation "pour la forme" dont on se demande bien l'utilité, même pas bien jouée en plus.
Je vous passe la réunion internationale des méchants genre : "Les indicateurs du crime sont aux verts, tout est sous contrôle" (déçu de pas voir le fantôme noir au passage), les ressorts scénaristiques qui grincent, le vieux méchant repenti, les plans sur les caméras qui ont, comme le réalisateur le souligne lourdement, une importance capitale. Comme Seydoux, Christoph Waltz joue son personnage de méchant fantasque et imprévisible sans lui donner d'épaisseur particulière mais une trivialité malvenue, ce qui m'a aussi déçu. Fiennes a aussi un rôle archétypal mais s'en sort tout à fait bien.
Un film dont la courbe de plaisir de vision fait preuve d'une grande dispersion : des scènes époustouflantes, un héros maxi beau gosse à côté de personnages bien ternes et des arcs scénaristiques convenus, sans compter sur cette impression, un peu moins prononcée que d'habitude d'assister à un clip publicitaire longue durée.
Il plaira sûrement aux aficionados, aux alignés, aux inconditionnels. A voir si ce n'est pas le Cinéma qui vous attire au cinéma.