Le nouveau JB est arrivé. C’est peut-être la dernière fois avec Daniel Craig, car il semble (déjà), en avoir marre du rôle. Ce James Bond est vraiment curieux. Et il commence comme le meilleur des Bond, en plein Mexico city, en pleine fête des morts, avec un vrai/faux plan séquence (?) Et un départ tonitruant. Maîtrise technique et esthétique. Des milliers de figurants, un combat à corps à corps à l’équilibriste dans un hélicoptère…je n’en dis pas plus. Intro capable de rivaliser avec le désormais culte Casino Royale, rien que ça. Ensuite, il y a un petit problème. Pas le générique que beaucoup critiquent. La chanson est certes banale, mais je ne vais pas voir un Bond pour son générique. Force est de constater que Sam Smith ne fait pas oublier Adele, mais qui eut crût que cela aurait été possible ? Pour moi les meilleurs thèmes Bond, ont été interprétés par des femmes. Goldfinger, et Diamonds Are forever, Shirley Basset en tête. Donc ce n’était pas possible. Passons le générique.
Le problème de ce Bond, est stylistique. James redevient la machine à tuer, qu’on s’était évertué à évacuer dans les épisodes récents. Le tueur avait quelques failles bienvenues, surtout des faiblesses face au genre féminin, (amoureux malheureux de Vesper, dominé par la figure maternelle M/ Judi Dench). Des fantômes de son passé avaient refait surface, comme pour nous dire qu’il lui restait un fond humain. Que s’est-il passé ? Il y a marche arrière toute ! On a à peu de choses près, un film d’action GI. Joe, alors qu’on avait fait une évolution vers le film espionnage avec une tension dramatique, un scénario avec plus d’enjeux…« On se fout de nous ! » diront les fans qui avaient été emballés par la mise à jour de la franchise. Peut-être que non, en fait. C’est peut-être juste, un juste retour des choses.
Mendès ne voulait pas refaire un Skyfall 2. Je le comprends. Se serait un échec de se copier-coller soi-même. Que reste-t’il comme options ? Craig veut passer à autre chose ? Mendès reprend ses billes. Et si on faisait tour de manège étourdissant comme au bon vieux temps ? Un son et lumière qui va rassurer les fans de la première heure ? Un film pour ceux qui croient toujours en ce symbole phallique, héros macho, indestructible, aventurier invulnérable, qui survit à tout, et baise tout ce qui bouge, qui s’en sort toujours, sans le moindre grain de poussière sur son costume trois pièces. C’est ça que le premier public de Bond veut voir, c’est lui qui remplit les salles. On n’est pas là pour réfléchir, on est la pour s’amuser, place à l’action. Exemple :
La scène de course poursuite, avion contre 4X4, Bond dans l’avion, la fille retenue dans les voitures avec les méchants. Cette scène se termine de façon tellement bourrin, que ça m’a mit une grosse puce à l’oreille. C’est pas normal, ça c’est du niveau Roger Moore : « Rien Que Pour Vos Yeux », (le bien nommé). Ça n’a rien à faire là. Et cela n’a rien d’hasardeux. Le producteur A. R. Brocoli a toujours préféré le Bond bourrin, à la Roger Moore, que le playboy, à l’humour vache, séducteur campé par Connery. Craig fait un mix des deux, de façon magistrale, d’où peut-être le succès ; privilégions le spectacle, ne prenons aucun risque inutile. Le métier de Mendès, (et il est bon), fait le reste.
Donc clins d’œil à répétition vers les anciens numéros. Scène de torture inspirée de Goldfinger. Aston Martin vite cassée comme d’hab, après course poursuite, bien sûr. Un méchant tout en muscles, surgit. Il est mutique, et ressemble assez au méchant ressuscité de »L’espion Qui m’Aimait-Moonraker », le fameux Requin. Corps à corps ultra violent dans un train en marche? « Bon Baisers De Russie » ? Ce n’est pas la première fois qu’on nous fait dans le catalogue de citation du parfait petit Bond illustré, mais cette fois, c’est la totale.
Et je ne peux m’empêcher de citer cette scène de fuite de la base secrète de SPECTRE. En plein désert. Bond qui vient de se faire torturer, cours comme un lapin, tue tout ce qui bouge, tout seul, sans rater personne, et tous les snipers, qui eux visent très mal du coup…Très bourrin. Encore du Moore. Ce film est un remix, un salut pour les fans de base. Et pour ceux qui seront un peu plus exigeant, on va les amadouer.
Les fameuses James Bond girls ne sont plus des postiches de magazine. Monica Belluci est plus MILF que JBG, et Léa Seydoux va au charbon. À une certaine époque, ce ne serait qu’une poupée blonde de plus. Les autres : M, Q, Moneypenny interviennent dans le jeu, alors qu’avant ils étaient aussi spectateurs que nous. Et l’humour de Bond a fait école. De l’humour, par petites touches, tout le temps. Quand j’ai vu que même Q, le petit génie taciturne, sérieux comme un pape, se mettait à faire des blagues, et que l’acteur jouait second degré, je me suis dit qu’il ne fallait pas chercher midi à quatorze heures. Même le méchant de tous les méchants, celui qui poursuit bond depuis Casino Royale voire plus loin encore, même lui s’y met. Le patron de l’organisation tentaculaire, la mondiale du crime. Même le chef de SPECTRE fait de l’humour ? Ceci est un hommage, ou un au revoir. Tout simplement.
Et jusque dans le plus petit détail, tout compte, pour que ça nous parle, c'est un remix. Quand il veille Bond, arme à la main sur le sommeil de la fille, et qu’un rat apparaît sur le parquet. S'ensuit une discussion entre agent infiltré, chair à canon, qui se bat pour survivre, encore une fois lâché par ses services, et vrai rat d’égout, qui regarde sans comprendre, et qui part sans demander son reste ? « Les Diamants Sont Eternels », il me semble, non ? Ce film est un parfait collage, de tous les Bond passés, et à venir. Refaire tous les Bond, et privilégier le spectacle, avec un scénario qui joue la théorie du complot international, car ça fonctionne toujours. Des scènes d’action ciblées, débiles, ou violentes, ni trop, ni trop peu, une progression narrative habilement plate, éparpillée entre Bond, et les autres personnages, pour faire oublier le manque de fond. Faire que ça ressemble beaucoup à la suite de Skyfall, gage d’un minimum de sérieux. Des paysages grandioses. Les montagnes frontales et enneigées, format paysage. Très beau. Le désert brûlant, mais une lumière comme adoucit, pas agressive du tout. Rien ne doit troubler le confort du spectateur, c’est ça ? Une carte postale 007, un peu nostalgique. Ça sonne comme un au revoir. La production a décidé de ne pas trahir une recette qui fonctionne si bien depuis presque cinquante ans ( !) Et dans ce genre de situation, il y a des concessions de part et d’autres à faire. Et surtout ne pas faire trop intello. D’où le côté bourrin, vendeur. Roger Moore ?
Et la fin explicite me donne raison. Si c’est pas un au revoir ça, c’est quoi ? Une conclusion qui est très : « Au Service Secret De Sa Majesté ». Craig va réellement quitter le rôle ? Dommage. C’est le seul qui est arrivé à me faire oublier Sean Connery. Même quand il fait du Moore, il assure à fond dans le rôle.