Cent dollars pour un sheriff est quasiment un des derniers grands westerns hollywoodiens, avant la traversée du désert des années 70 où il sera sévèrement remis en cause, puis pratiquement laminé par le western italien et ses outrances. Un certain panache et un humour picaresque s'y mêlent avec l'efficacité dont Henry Hathaway faisait preuve dans ses meilleurs moments. Et justement, cette efficacité est ici toute relative, le rythme est plutôt pépère, avec un manque de punch évident où Hathaway livre une mise en scène sans génie. Il nous a clairement habitué à mieux, rien que dans le domaine du western, avec des films comme le Jardin du diable, la Fureur des hommes ou Nevada Smith, et même déjà avec John Wayne en vedette, les sympathiques les 4 fils de Katie Elder et le Grand Sam.
L'action se fait rare, il y a peu de fusillades, le rythme est assez lent, et laisse la place à des dialogues certes brillants dans des scènes d'affrontements avec insolence entre Rooster Cogburn et sa jeune protégée qui se vouent cependant une mutuelle admiration. C'est ce côté auquel s'est intéressé Hathaway, aux liens qui pouvaient unir un vieux sheriff borgne et porté sur la bouteille à une gamine volontaire. C'est ce que je n'arrive pas à comprendre, que ce film ait été autant plébiscité par la critique dès sa sortie ; sans doute est-ce dû au fait que John Wayne y incarne un personnage un peu à contre-emploi de cowboy vieillissant, bedonnant et alcoolique, capable de charger 4 bandits à cheval avec son Colt dans une main et sa Winchester dans l'autre, en tenant les rênes entre les dents. Un rôle suffisamment truculent qui lui vaudra son unique Oscar, alors que dans une si riche carrière comme la sienne, il aurait pu en récolter au moins 2 ou 3, notamment pour la Prisonnière du désert, Rio Bravo ou L'Homme tranquille... bref, pour moi, ce n'est pas avec ce film qu'il aurait dû avoir l'Oscar, mais après tout, je crois que l'Académie réparait une injustice car ça faisait un peu comme un Oscar d'honneur récompensant l'ensemble d'une carrière.
Ce western m'avait pour toutes ces raisons, et aussi parce que la gamine est parfois pénible, laissé assez dubitatif, mais je l'ai revu et je décide de le réévaluer légèrement d'1 point, il continue à n'être pas assez passionnant pour moi, mais présente quand même quelques qualités, en trouvant son principal intérêt dans ses superbes paysages et dans ses acteurs, où l'on remarque un Robert Duvall qui va monter en puissance un peu plus tard avec le Parrain, et un tout jeune Dennis Hopper dans un petit rôle. A noter que John Wayne reprendra son personnage de Rooster dans Une bible et un fusil en 1975.