Il y a des sujets casses-gueule qui sont difficile à aborder et pourtant certains réalisateurs parviennent à relever le défis avec une facilité déconcertante. C'est notamment le cas de Robin Campillo avec 120 battements par minute.
Deux choses frappent : la première c'est ce naturel qui parcoure tout le film, rien ne semble fictif et cela aide grandement le spectateur à s'identifier aux personnages, concernés par le sujet ou non d'ailleurs. La deuxième c'est le traitement du sujet justement. On se souvient de Eastern Boys dans lequel le réalisateur parlait avec pudeur d'un sujet sensible. Ici il est plus frontal mais tout aussi pertinent et vrai. Car au-delà de parler d'un combat il parle surtout d'une maladie. Celle qui dévore tout, une passion, une étreinte, une vie, des projets. Elle impose des résolutions à prendre. En cela le film est efficace car il n'y va pas par quatre chemin, il montre et c'est tout. C'est brutal, bouleversant, parfois glauque mais toujours juste.
Mais le plus beau dans l'exercice c'est surtout qu'au-delà du sujet principal, Robin Campillo traite avec brio une histoire d'amour qui sans la maladie serait banale. Là aussi il montre tout, quitte à choquer pour mieux coller à la vérité. Il film le sexe comme un langage. Les longues discussions nocturnes sur l'oreiller où l'on se découvre pour s'aimer. L'amour est un des moteurs du film, il anime les convictions de Nathan dans son combat, ravive la flamme de Sean et lui offre un soutient face à l'inévitable.
Les interprétations sont incroyables, sûrement les plus belles que l'on ai vus cette année. Nahuel Perez Biscayart est saisissant en jeune séropositif fougueux et incisif, face à lui s'impose Arnaud Valois totalement différent, la carrure plus impressionnante et pourtant incroyablement doux dans son jeu, très vrai lui aussi. Les moments intimes des deux personnages sont sûrement les scènes les plus poignantes du long-métrage, comme cette scène à l'hôpital dans la dernière partie du film, qui pourrait choquer et qui raconte tellement de choses importantes pourtant. Bien entendu le reste du casting n'est pas en reste, Adèle Haenel est impeccable également. Au-delà du casting on apprécie aussi la délicatesse de Campillo dans la mise en scène. Cette dernière s'impose comme une vraie proposition de cinéma, là où la musique et les images deviennent vectrices de sensations.
120 battements par minute est un choc, presque un traumatisme. Mais c'est sa rigueur et sa dureté qui font de lui une oeuvre exceptionnelle. Robin Campillo signe ici un film juste sur un sujet difficile, porté par un duo d'acteurs formidables. Une totale réussite !