Une mésaventure sous forme de clip halluciné

Après avoir cartonné aux Oscars (8 récompenses) en 2009 avec Slumdog Millionaire, Danny Boyle (Trainspotting, La Plage, 28 jours plus tard, Sunshine) revenait à la charge en 2010 avec 127 Heures, récit biographique (enfin, en quelque sorte), l’un des favoris aux Oscars de 2011. Bon, malgré ses 6 nominations, le film n’en remporta aucune. Mais cela ne l’a pas empêché d’avoir un succès auprès du public et de la presse. Plongeons donc dans cette aventure que le British nous a si gentiment concocté après son « film bollywoodien ».

127 Heures revient sur la mésaventure d’un alpiniste, Aron Ralston, qui, lors d’une randonnée dans les gorges de l’Utah (dans le Blue John Canyon du Parc national de Canyonlands, plus exactement), se retrouva coincé pendant 5 jours dans faille, la main droite bloquée sous un rocher. Alors, pour cette critique, je ne vais pas me lancer dans la polémique qu’a lancée le film. Celle de mettre en avant une personne qui ne mérite pas le privilège d’avoir un film. Notamment à cause de sa mentalité : fêtard et irresponsable, fonçant tête baissée. Une insouciance qui lui coûtera d’ailleurs cher ! Non, ici, c’est de la qualité du film dont nous allons parler !

Partant du principe que 127 Heures retrace le malheureux périple de cet Aron, le suivant pendant les 5 jours de tortures (où il subira la faim, la déshydratation, la paranoïa, la folie…) qui vont lui faire ressasser tous les petits détails de sa vie (liaisons avec les filles, avec ses parents…) et ainsi le remettre en question. Dès lors, la structure du film se laissait très vite deviné : les douleurs et plaintes du protagoniste avec, dans le lot, quelques flash-backs revenant sur sa vie. Un schéma narratif classique en quelque sorte ! Et pourtant, même là-dessus Danny Boyle évite le cliché. Pour les besoins de la mise en scène.

Car, dans l’esprit de la filmographie de son réalisateur, 127 Heures se présente comme une sorte de trip halluciné. Un clip haut en couleur au service d’une histoire dramatique. Des flash-backs, il y en a, mais livrés aux spectateurs de manière frénétique. Pour bien insister sur la folie qui prend petit à petit Aron, sans pour autant ôter la dramaturgie de l’ensemble. Ajoutez à cela des images « publicitaires » de bouteilles pour exprimer sa soif, des images accélérées pour passer du jour à la nuit, un échange réalité/caméra qui fait croire à une interview (avec applaudissements et tout). Rien n’est négligé dans le soin apporté dans le soin de la mise en scène, autant pour se montrer réalisme (on a vraiment l’impression de regarder un documentaire) ou pour renforcer certains effets (l’agréable chaleur du soleil matinal, la douleur lors de la « libération » d’Aron, le dégoût lorsque ce dernier va jusqu’à boire son sang et son urine…). Une mise en scène qui en rebutera sans doute plus d’un (d’où la note que j’accorde au film) mais qui témoigne d’un certain sens du génie visuel de Danny Boyle.

Et puis, niveau distribution, 127 Heures tape très fort ! Bon, on ne peut pas dire que le casting soit imposant au niveau de sa taille. Et pour cause, le film ne compte que 8 « gros » comédiens, dont la plupart ne font qu’office de figurants (notamment dans les flash-backs). Nous ne retiendrons donc que Clémence Poésy, Kate Mara et Amber Tamblyn comme personnages secondaires. Qui n’apparaîtront à l’image que pour quelques minutes (10, tout au plus !). S’il y a un nom à retenir de 127 Heures, c’est sa tête d’affiche : James Franco ! Reconnu par le grand public son interprétation d’Harry Osborn dans la trilogie Spider-Man de Sam Raimi, trouve ici le tremplin qui lui permettra d’avoir la renommée qu’il connait aujourd’hui (Harvey Milk, La Planète des Singes : les Origines, Spring Breakers, Le Monde Fantastique d’Oz, The Iceman…). Des films qui ne valent déjà rien que pour la prestation du comédien. Un jeu d’acteur de très grande qualité qui se confirmait via se film. Franco étant tout simplement aussi sûr qu’Aron. Vraiment dommage que l’Oscar du Meilleur acteur lui ait échappé (même si c’est le talentueux Jeff Bridges qui l’emporta).

Voilà, alors on peut avoir un avis sur le fait de faire un film ou pas sur une telle personne. Mais quand on regarde un film, c’est au niveau de sa qualité qu’il faut amplement regarder et non que dans le but recherché. Car ceux qui auront en quelque sorte boycotté ce film auront loupé un véritable exemple de mise en scène et d’interprétation. Et tout cela pour seulement 18 millions de dollars de budget ! Confirmant que Danny Boyle reste un cinéaste à suivre (même si c’était déjà le cas depuis ses autres films).

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le 6 oct. 2013

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