J'en veux presque à McQueen de m'avoir laissée croire que j'étais à ce point insensible. Avec un sujet tel que l'esclavage, il est parvenu à me faire bailler et me frotter les yeux, non pas de tristesse, mais de fatigue.
Dès le départ, malgré quelques larmichettes aux premiers coups de ceinturon endurés par notre héros, la réalisation de Steve McQueen n'a pas pris sur moi. A l'instar de son Shame, j'ai trouvé son film froid et tellement éloigné de son personnage central qu'il en venait presque à le rendre antipathique. A aucun moment je n'ai été émue par ce que Solomon vivait et même dans certaines situations critiques, qu'il meurt ou pas m'était presque égal. Tout ça parce que la mise en scène ne prenait pas soin de lui. Que se passe-t-il dans sa tête ? Comment endure-t-il le temps ? Oui ces fameuses 12 années, absolument mal rendues dans le film. Solomon a du endurer, attendre, prier, espérer... Et pourtant, quasiment pas de trace dans le film. Les dialogues sont dénués d'intérêt et les moments où le personnage est seul ne réflètent que très mal ce qu'il peut ressentir. Alors que c'était ces silences-là qui rendaient parfois le personnage de Fassbender intéressant dans Shame.
Seule une scène est véritablement magnifique et pourrait résumer à elle-seule la condition de Solomon : celle du chant repris avec le groupe pleurant la mort d'un des leurs. Ne faisant d'abord qu'écouter, il va commencer de chanter, puis plus fort que tous les autres. Il accepte enfin. Mais bon, une scène ne sauvera jamais un film. J'ai également apprécié le personnage de Cumberbach qui est, pour moi, presque pire que celui de Fassbender car il n'a rien de plus détestable qu'un esclavagiste "sympa". Sa lâcheté ne vaudra pas mieux que cent coups de fouet.
Formellement, le film est correct. Je n'ai pas aimé la photo, mais on s'y habitue. Certains plans séquences prouvent que McQueen sait quand même de quoi il parle mais le tout reste classique et parfois un poil prétentieux et vain (les plans fixes d'une minute). Les acteurs ne sont pas mauvais, même si aucun ne tire son épingle. Fassbender est en sous régime et les autres n'ont aucune fulgurance. Mais le casting reste un des meilleurs atouts du film (Pitt, Dano, Cumberbach, Giamatti, ça en fait du beau monde).
Et pour finir, last but not least, un mot sur la musique de Zimmer : naze.
Voici donc une petite déception pour ce 12 years a slave qui était attendu par beaucoup. Cela confime mon impression sur McQueen bien que je ne manquerai pas de voir son premier film pour entériner la chose ou pas. Deux métrages ne sont pas suffisants pour se faire une opinion sur un cinéaste. J'ose espérer qu'il prendra le temps de soigner ses héros la prochaine fois, au lieu de vouloir traiter de faits, barbouillés d'effets superficiels.