Quand le cinéma contemporain rencontre le passé des Etats-Unis, c’est bel et bien presque toujours pour réconcilier les américains avec leur histoire. Et en général, ils se loupent très rarement. Rien qu’en examinant les douze derniers mois, on peut au moins compter quatre bons voire très bons films sur le sujet : Django Unchained, Le Majordome, Mandela : Long Way To Freedom et Fruitvale Station. Autant d’arguments taillés sur mesure pour rappeler que la ségrégation, la traite des esclaves, le racisme ou encore la privation des droits de l’homme sont désormais loin derrière nous.
Tous les mêmes. Et Steve McQueen de porter à l’écran ce qui semble être le récit le plus frappant à ce sujet : Twelve Years A Slave. En choisissant de se focaliser sur le malheur d’un homme, il touche ce qui en chacun de nous fait que nous sommes des êtres humains. L’idée est de montrer la violence au plus haut niveau, voire de la rendre quasi-réelle à l’écran, qu'elle nous frappe tous. Nous aussi, tous les mêmes.
Pour cela, le cinéaste fait de sa caméra un témoin du récit à part entière, collant au plus proche des visages avec toute l’intimité qui convient. Et quand ce ne sont pas des gros plans qui nous donnent à voir l’âpreté de chaque scène, ce sont d’excellents plans-séquences qui prennent le relais. Steve McQueen se paye même le luxe de filmer par ce biais deux scènes très dures afin d’insuffler toute la violence nécessaire à son propos.
Outre le talentueux cadrage ainsi effectué, Twelve Years A Slave brille avant tout pour son casting impérial : Benedict Cumberbatch, Paul Dano, Lupita Nyong’o, Brad Pitt, avec en tête Micheal Fassbender, pour sa troisième collaboration avec le réalisateur, mais enfin et surtout Chiwetel Ejiofor dont la qualité d’interprétation dépasse l’entendement. A leurs jeux d’acteurs saisissants s’ajoute une bande-son magistrale signée Hans Zimmer, laquelle surlignera jusqu’au bout la force du propos tenu par le film.
L’honnêteté, c’est peut-être le meilleur mot pour caractériser le cinéma de Steve McQueen. Il est paradoxal d’affirmer que l’image d’un passé aussi douloureux puisse être aussi belle à regarder. Et pourtant, le résultat est là, avec toute l’émotion qu’il convient d’afficher en contemplant Twelve Years A Slave. Un drame poignant que ne manqueront pas de récompenser les Oscars, histoire de rendre ce qui lui appartient à César.