12 years a slave (Oscar du Meilleur Film 2014)

Comment fait-on pour vivre dans un monde de totale injustice ? Dans un monde où montrer ses talents et ses qualités se retourne irrémédiablement contre vous ? Dans un monde où il faut se méfier de chacun, où aucune solidarité n'est possible ? Où l'on doit regarder ses semblables souffrir en silence, de crainte d'être soi même la cible des coups de fouet ? Dans un monde où l'on se retrouve bourreau, pour le seul soulagement des véritables bourreaux qui n'ont pas la force de manier le fouet eux mêmes ? Dans un monde où s'octroyer les faveurs d'un ''Master'' un peu moins inhumains que les autres ne fera qu'éveiller la jalousie et le courroux d'un contremaitre, d'un intendant, ou d'un autre maitre?

Première leçon : on ne vit pas, on survit. Deuxième leçon : faire profil bas. Seulement, lorsqu'on est né ''homme libre'', le profil bas est difficile. On a beau se résigner, il reste toujours un petite flamme, timide, qui nous pousse à protester quand l'injustice devient trop grande, quand l'accumulation dépasse les bornes de l'entendement. Alors à chaque réflexe pour sortir la tête de l'eau, pour rester humain, on se retrouve systématiquement enfoncé encore plus bas, plus durement. Une once d'espoir continue de survivre, malgré tout, ou le besoin d'espérer, de rester attentif aux visages qui pourraient s'avérer sympathiques, ou complices, ou au moins solidaires et compréhensifs. Cette dernière pointe d'espoir, c'est ce qui peut nous sauver, ou nous perdre.

Quant à nous, on se retrouve ballottés. Ballotés entre le dégout de se sentir voyeur des sévices et la révolte qu'on espère voir surgir chez ces hommes déclassés et asservis, les lumières et magnifiques paysages du Sud (la photographie est très belle dans ces plans de coupe) étant le seul réconfort. Et l'on se prend à souhaiter se retrouver dans un autre film. Ce serait, disons, une envie vengeresse, d'un film où un héros ironique et déterminé viendrait chercher violente réparation, d'un sobre ''I like the way you die boy''.

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le 3 mars 2014

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Phil Dela

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