Her (en aspirant bien le H, souvenez vous de vos cours d'anglais)

Los Angeles, dans un futur proche. Dans une ville brumeuse, à la lumière dorée, on se sent comme engourdi. C'est beau et anesthésiant. Les humains arpentent les rues en parlant à leur oreillette. Connectés et déconnectés à la fois. Quand une nouveau système d'exploitation (OS) autorise l'adaptation de la machine, un apprentissage et une évolution en permanence, qui lui autorise la sensation de sentiments, les humains commencent à établir des relations (amicales, amoureuses) avec ceux-ci.

Dans ce monde à la fois proche et lointain, sous l'oeil esthète (superbe photographie, quelques plans vraiment très beaux) de l'ex-vidéaste Spike Jonze- qui a aussi travaillé sur le mobilier (couleurs acidulées) et la mode à venir (Un conseil Messieurs, mettez vous aux pantalons de flanelle taille haute)-, Théodore (Joaquin Phoenix, sobre comme jamais) sort tout juste d'une rupture difficile. Il est morose, terriblement seul, et pourtant il doit à longueur de journée écrire des lettres d'amour pour d'autres personnes (c'est son métier). Jusqu'à ce qu'il ''rencontre'' Samantha (Scarlett Johansson
, à la voix un peu rauque, qui semble toujours à la limite de la rupture, splendide), un OS. (ça fait beaucoup de () pour un seul paragraphe, vous ne trouvez pas?)

Comment les relations entre humains peuvent elles continuer à exister, lorsque l'on peut établir une histoire avec un être en perpétuel apprentissage, en perpétuelle adaptation ? Lorsque celui-ci apprend et retient tout de vous ? Même les disputes semblent être là au bon moment, même les moments de cafard ou de tension. Les humains, ces créatures si imparfaites et incapable de s'adapter, de se mettre au niveau de ce qu'exigent des relations de long terme, ne seront jamais capable d'être aussi fins ni aussi efficaces dans cette évolution permanente. Une première réflexion ici qui se pose, le fait que les relations humaines sont vouées à l'échec, de par les changements inopinés, incontrôlés qui s'opèrent en nous, et qui nous éloignent de ceux qu'on aime (et qui les éloignent de nous).

Puis l'on se rend compte que cette impossibilité des relations, ou du moins de leur survie, est la même entre humains et OS. Parce que leur apprentissage à eux est trop rapide, leurs capacités trop grandes, pour se contenter de relations avec des êtres aussi limités que nous. Vous avez sans doute déjà eu cette envie profonde, d'être plusieurs personnes à la fois, d'avoir plusieurs vies, de vivre plusieurs situations, en même temps. Le développement des réseaux sociaux et de ''vies virtuelles'' est justement interprétable dans ce but. Les OS, eux, peuvent se permettre ce genre de chose, cette forme d'ubiquité. Et l'on se rend compte que cela produit une course en avant, frénétique. Une croissance exponentielle de leur personne, de leurs connaissances et de leurs relations, qui leur rend le contact humains trop fade, trop inconsistant, pour s'en satisfaire. Non, décidément, les relations humaines (et même non humaines) sont intenables à long terme.

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le 25 mars 2014

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Phil Dela

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