13 Assassins par Mourkhayn
Synopsis :
Le seigneur Naritsugu est le demi-frère du Shogun actuel. Mais Naritsugu est surtout un psychopathe fini, qui viole et assassine à tour de bras, s'entraine à l'arc sur la famille de ses victimes et vous explique avec calme pourquoi c'est normal (et en plus il ne s'arrête pas aux paysans mais découpe aussi du noble). Problème supplémentaire, le Shogun est sur le point de le faire entrer dans son cercle de conseillers les plus proches. Le conseiller en chef, qui est vieux et sage (et ne peut donc pas dire à son patron qu'il fait une grooooosse boulette) décide donc que l'ami Naritsugu se porterait mieux avec une quelques centimètres d'acier entre les yeux (ou les omoplates, ou un peu n'importe où en fait, tant que ça ne repousse pas). Il confie la mission a un samuraï : Shinzaemon Shimada, qui va devoir se trouver des amis pour aller massacrer le monsieur (et sa horde de gardes du corps) tandis que ce dernier rentre chez lui après une année à Edo.
La première partie présente le recrutement de l'équipe, la planification du piège (transformer un village en piège mortel) et le jeu de cache-cache entre les assassins et leur cible. Le fait que le chef de la garde de Naritsugu, Hanbei, soit un ancien collègue et rival de Shinzaemon apporte un peu de piquant supplémentaire. Quelques intrigues politiques pour rajouter un peu de suspens avant la partie finale : un bon gros massacre au katana dans les ruelles sordides d'un bled paumé.
Commentaire :
Si comme moi ça vous fait penser aux 7 Samuraï de Kurosawa, vous ne serez pas déçu : l'idée est la même et l'exécution (sic!) aussi. Le fou est au rendez-vous pour apporter une dimension comique à la troupe hétéroclite : jeunes et vieux, samuraïs et ronins, épéistes et archers, il y a de tout. On peut par contre regretter que les personnages soient assez inégalement développés : 6 d'entre eux ont une épaisseur et on a l'impression que les autres sont juste là pour permettre de mettre plus de méchants en face.
Niveau scénario, peu ou pas de surprises non plus mais un crescendo de tension plutôt bien ficelé. Toute la première partie concerne le duel d'esprit et de manipulation entre Shinzaemon et Hanbei : chacun tente de prédire les mouvements de l'autre, de les contrôler tout en masquant les siens. Chacun réserve une mauvaise surprise à l'autre. Même les moments humoristiques sont teintés d'une certaine gravité : le devoir prend le dessus sur les sentiments.
Tout cela débouche sur la fin du film, dont l'objectif est clairement de libérer toute la tension accumulée en un tourbillon de lames et de mort dans des mêlées sanglantes et tant pis si le réalisme en prend un coup. Le village fait passer le Vietnam pour un parcours de santé : tout est piégé, les bâtiments explosent, s'écroulent et ensevelissent des hordes de chair à katana sous les décombres, des herses monstrueuses sortent de nulle part pour bloquer les assaillants et chaque échappatoire est en fait une zone de tuerie minutieusement préparée. Au milieu de ce chaos, les 13 virevoltent, insaisissables et noirs comme des ombres, criblant la piétaille de flèches avant de s'attaquer aux survivants au corps à corps. Les scènes de combat sont intenses, implacables, et Miike nous en remet jusqu'à la nausée. La troupaille panique et se fait tailler en pièce tandis que Hanbei garde la tête froide et fait son maximum pour sortir un Naritsgu rendu extatique par le carnage de ce traquenard. Bien sûr, le nombre prend son dû et, un par un, les héros tombent, jusqu'au duel final et attendu.
Malgré toute la jouissance que ces carnages peuvent susciter (on parle ici à de choses aussi intenses que l'ouverture de Il faut sauver le soldat Ryan), j'ai quand même trouvé que certains entorses au réalisme laissaient un goût amer dans des globes oculaires (qui, à part ça, sont aussi desséchés par le fait de fixer un écran géant sans ciller que l'on peut l'être) :
* La réaction des héros au mauvais coup fomenté par Hanbei est tout sauf logique (pas de spoil, non non)
* 80% des méchants sont vraiment juste là pour ne pas savoir parer et se faire découper. Classique, me direz vous mais il y a quand même un peu trop de plans où un méchant se trouve juste derrière un héros... une position qu'on n'a qu'en couchant avec le scénariste... on s'attend donc à ce qu'il l'embroche comme il faut et... rien!
* conséquence assez logique du point précédent, c'est à se demander si les méchants ne se relèvent pas dès que le caméraman a le dos tourné, parce que vu la cadence de découpe des héros, on se demande comment il peut rester un méchant debout après de 5 minutes de fight.
* re-conséquence logique on assiste à un effet "arcade" dans la gestion des héros : ils ont droit à 20 minutes d'invincibilité pendant lesquelles ils sont intouchables (non, ils ne clignotent pas...) puis décèdent en masse dans les 10 dernières minutes.
Seule surprise de mon point de vue : le choix des samuraïs survivants à la fin du film. En résumé, il se regarde bien mais ne vaut à mon avis pas son illustre modèle.