Après un James Bond mémorable et un autre beaucoup moins, Sam Mendes change radicalement de registre pour nous offrir un film de guerre présenté sous forme de deux immenses plans-séquences où deux jeunes soldats britanniques doivent parcourir les lignes ennemis pour délivrer un important message à un bataillon allié dans la France de la Première Guerre. Un high concept bienvenu mis en scène avec la maestria que l'on connait du réalisateur anglais. Deux plans-séquences donc, truqués bien entendus mais d'une rare précision et d'une beauté renversante, le travail accompli par Mendes et son équipe étant des plus remarquables, en particulier la photographie changeante en fonction du temps du fidèle Roger Deakins.
Nous suivons donc principalement le parcours du combattant du Caporal Will Schofield (George MacKay, la révélation de Captain Fantastic) zigzaguant entre les cadavres, les embuscades et les imprévus au cours d'un temps imparti pour sauver toute une escouade d'un piège fatal. Filmé comme un vrai film d'aventures, 1917 nous happe, nous désarçonne et nous éblouit du début à la fin grâce à une totale maîtrise du décor et du rythme, Mendes s'inspirant autant de Cuarón que de Nolan et Spielberg pour délivrer un spectacle ahurissant et mémorable qui porte toutefois indéniablement la patte du metteur en scène britannique. Car au-delà des moments de bravoure et de tension à couper le souffle, l'oncle Sam nous gratifie d'une beauté esthétique tranchant sublimement avec la dureté des décors : photographie impeccable, jeux d'ombres inouïs (en particulier lors des séquences nocturnes), musique lancinante, mouvements de caméra surprenants se faufilant tel un serpent... Le spectacle est constamment assuré.
S'accaparant le plan-séquence comme personne, Mendes nous décolle la rétine à grands coups de scènes inattendues et démesurées, sans coupe visible donc, à l'instar d'un crash d'avion tout bonnement inédit. Immersion totale dans la France dévastée par la Première Guerre Mondiale, ne souffrant que de légers défauts numériques visibles (les rats et quelques menus détails) et de passages over the top quasi-obligatoires dans ce type de métrage, 1917 reste une péripétie dantesque, du grand cinéma riche, inspiré et inspirant, qui peut se tarir de se hisser au sommet des œuvres du genre et de confirmer que Sir Samuel est un très grand réalisateur.