L'idée d'une nouvelle humanité ?
2001 c'est la quête de l'homme dans l'homme et ses créations. Plus précisément, c'est la quête de son exception, l'intelligence, à laquelle la séquence inaugurale donne un statut de révélation mystérieuse. Le monolithe noir, qui révèle aux primates l'outil, la science, et qui conduit sans transition à la conquête spatiale. Cet évènement de l'intelligence humaine, inexplicable, est en quelque sorte le premier domino de la longue chaîne ayant conduit à l'humanité actuelle.
Cette première humanité, passée du grand singe à l'homme, rencontre à nouveau le monolithe noir (sur la lune, cette fois). Celui-ci apparaît au début de la conquête spatiale de l'homme, pourrait-on dire (la lune étant le première limite humaine de l'espace, les Grecs parlaient déjà de "monde sublunaire" en parlant de la terre). Mais surtout, il intervient cette fois pour signifier que l'humanité vient d'entrer dans un nouvel âge, celui d'une intelligence qu'il a lui-même créé, l'intelligence artificielle.
Duel entre Hal9000 et les astronautes pris au piège par cet ordinateur à l'intérieur de la station, 2001 peut à première vue se lire comme un duel des rationalités, des intelligences. Mais l'enjeu est plus général que ça. A l'issue de la victoire d'homme sur la machine, celui-ci est propulsé dans une vision dont je vous réserve la surprise, mais qui mène à contempler une autre humanité, un "nouveau-né cosmique" qui aura su intégrer les deux premiers sauts (matérialisés par les monolithes, celui de l'intelligence de l'outil et celui de l'intelligence artificielle) de l'humanité pour être autre chose.
Le second saut, le second monolithe noir, est un nouveau mystère aux yeux de Kubrick, comparable au premier en intensité, et en conséquences. Il s'agit d'une réelle nouvelle étape de l'humanité qui en subira les changements, encore imprévisibles.
2001 dépasse à ce titre ce qu'il affiche à l'écran, et doit être rangé dans la catégorie des chef-d'oeuvre. Sa profondeur est presque infinie, et on peut dire que le film commence là où il s'arrête.