Jusqu'à présent, Inárritu était un type intéressant et plein de promesses.
Amours Chiennes était un projet plein de vie, de rage et de stupeur, soutenu par un casting impeccable, malgré une deuxième histoire un peu mollassonne.
Arrive son prochain bijou, un film-puzzle sur un trio maudit sur fond de transplantation cardiaque.
Rodrigue, as-tu du cœur ?
Mais hélas, cent fois hélas, le pauvre Alejandro s'emmêle les pinceaux et nous pond le film-puzzle le plus raté de l'histoire du film-puzzle.
Voici la situation :
On a un puzzle. On ne sait pas ce que c'est. Plein de pièces partout parterre, on cherche les coins. Au début on est un peu perdu, mais bon an mal an, certaines pièces parviennent à s'associer et, Ô joie ! Au bout de dix minutes on commence à trouver du sens à cet agencement...
On cherche encore un peu, on devine on espère, et là... Oh ! J'ai trouvé : c'est un bateau ! Grande satisfaction que cette découverte !
Alors on continue a mettre ces pièces ensemble, et on profite de notre savoir pour bien mettre les pièces où il faut, ce qui est très gratifiant intellectuellement. Vingt minutes plus tard, on a réussi à placer tout le mat, la poupe et la proue, il reste encore quelques planches de bois et le tour est joué.
Mais... Il nous reste 2431 pièces et 90 minutes !
Bon sang mais on va se faire chier, y'a plus que le ciel et la mer à mettre dans ce foutu tableau...
Eh bah reste !
Et on reste dans cette salle, devant un film dont on a tout compris, mais qui poursuit sa course au mépris des protestation du public...
Tout n'est pas à jeter dans 21 Grammes. La photo, la musiques, les acteurs... ils s'en sortent. Mais la narration et le montage sont un contre-exemple intégral.
On se met à penser à Atom Egoyan qui maitrise cette technique narrative mieux que quiconque et qui humilie 21 Grammes avec son Exotica...
On supplie Takeshi Kitano d'intervenir au plus vite avec Hana-Bi...
Car non content de saloper sa narration au point de livrer un film chiantissime, Alejandro González Inárritu parvient a annihiler l'impact de certaines scènes clefs qui auraient pu être poignantes si elles avaient été montées correctement.
Il y a une scène où notre trio arrive à l'hôpital à toute berzingue, Sean en sang.
Pour expier ses pêchers, Benicio se dénonce : "c'est moi qui lui ai tiré dessus !"
Alors Naomi tire une tête de trois pieds de long... Mmh... M'est avis qu'il ment !
Plus tard, on a accès à la scène qui précède. Scène de tension palpable... Mais hélas on sait déjà que Benicio va pas tirer, puisqu'il a menti, on sait que c'est pas Naomi parce que ça n'aurait aucun foutu sens... Alors qui est-ce qui reste ?
Et c'est sans aucune surprise Sean qui se troue la peau !
Si ces scènes avaient été montées dans l'ordre, on aurait frémi deux fois : une quand Sean se tire une balle et une quand Benicio se dénonce... Mais au lieu de ça on se tape des minutes et des minutes de pièces de puzzle bleues, auxquelles on est obligé d'être attentif malgré un ennui des plus profonds.