Quand les frères Larrieu renouent avec leurs meilleurs principes de cinéma

Il est toujours merveilleux de voir comment les Frères Larrieu possèdent encore aujourd'hui et avec maestria l'art du glissement dramatique. Du point de départ de Caroline (Isabelle Carré)qui vient récupérer le corps de sa mère dans son pied à terre en pleine campagne et de sa rencontre avec Pattie (Karin Viard),qui était bien plus qu'une femme de ménage pour sa génitrice,le paysage se nébulise ou s'éclaire. Là encore, la confrontation des univers des personnages,leurs façons de ressentir la vie sont le points de départ d'un voyage inattendu qui fera passer les spectateurs par tous les états et lui demandera de recoller quelques morceaux de l'histoire pour trouver sa cohérence.
Par rapport aux Derniers jours du monde,film des frères Larrieu,qui souhaitait une approche plus grand public en étant plus linéaire, les réalisateurs ont décidé de renouer avec leurs meilleurs principes de cinéma. En effet, ces deux cinéastes ne sont jamais aussi percutants que lorsque que leur canevas n'est pas balisé.Leur cinéma instinctif, débridé et libre peut alors s'exprimer totalement. Quand les Larrieu montrent leurs personnages tout en demandant à celui qui les contemple de voir au delà des postures et des situations, ils ne sont jamais aussi bons.
Retour aussi sur la performance des deux actrices, véritables moteurs émotionnels de 21 nuits avec Pattie. Bien que la performance extravagante et déjantée de Karin Viard ait été reconnue à sa juste valeur dans la presse, elle aurait presque éludée le jeu tout en retenue et l'évolution sensible et incroyable du personnage d'Isabelle Carré.Rendons lui donc justice d'incarner Caroline ballottée,malmenée avant de retrouver le phare intérieur de sa vie. Moins extravertie,à l'écoute, cette femme déjà mûre est aussi mesurée et cartésienne, ce qui lui permet de ne pas sombrer dans l'univers chaotique de sa mère Zaza. Et s'il y a, un voyage initiatique dans cette histoire, c'est celui de Caroline. Je pourrais revenir aussi sur la performance caméléon d'André Dussollier mais je préfère vous laisser la primeur de son rôle dans l'histoire. Le titre énigmatique du film brouille aussi et volontairement les cartes et son explication déjantée liée au personnage de Karin Viard a peu à voir avec l'avancement de l'intrigue. C'est encore un pied de nez maison des Frères Larrieu qui fait dire au spectateur avant la projection mais de quoi parlent-ils?
L'un dans l'autre, 21 nuits avec Pattie restera un film qui concentre plusieurs nuances de cinéma, subtil sans être académique ( il faut voir le cadre de la caméra rétrécir ou augmenter sans raison apparente) et aussi diversifié et complexe que la vie. Si vous êtes destinés à accueillir ces qualités du film des Larrieu, il se peut que vous passiez un excellent moment.

Specliseur
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le 2 déc. 2015

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