2A3H : un virus à attraper
On pouvait craindre le pire et on découvre le meilleur. Le pire parce qu'on présageait une sempiternelle comédie sur les états d'âme de jeunes adultes en proie aux affres du désenchantement, de l'amour, de la maladie et même de la mort avec sa panoplie nombriliste, parisienne et bobo. Alors, oui on peut dire qu'il y a tout cela dans ce film patchwork divisé en deux parties constituées de vignettes et de saynètes comme autant de chapitres, tantôt légers et cocasses, tantôt tragiques et tristes, qui jalonnent le récit d'une vie, de toutes les vies. On pouvait donc redouter la déception, sinon l'ennui, devant ces monologues face caméra, le numéro à présent bien rôdé de l'omniprésent Vincent Macaigne et on tombe rapidement sous le charme d'un film qui réussit à renouveler un genre pourtant éculé, truffé de trouvailles et de bifurcations, comme des appropriations personnelles et nullement exhibées des choses vues, lues ou entendues. En ce sens, le pyrénéen Sébastien Betbeder, qui écrit par ailleurs des fictions pour France Culture, montre aussi comment l'art sous toutes ses formes, en gros de Ian Curtis à Edvard Munch, embellit et nourrit l'existence. 2A3H est un film pudique et délicat, jamais empesé, toujours doux et lucide, qui satisfera dans un même élan les nostalgiques d'une Nouvelle vague française et les aficionados des comédies gentiment dépressives et transgressives de Judd Apatow, également cité dans le film à l'instar du chanteur Michel Delpech et du cinéaste Eugène Green, le tout dans un sens acéré du détail, notamment géographique et descriptif, qui évoque aussi l'univers si particulier et nostalgique d'un Georges Perec.