[EDIT : Honte sur moi, j'ai appris bien après l'avoir vu que ce film n'était en réalité PAS un Disney Channel Original Movie, j'ai été abusé par le fait que j'avais vu le film sur la chaîne... Pardonnez-moi :'( ]
Le Disney Channel Original Movie est à présent un genre à part entière, disposant de ses propres codes narratifs, ses archétypes à lui. Si un jour j'ai du temps à perdre je ferai une thèse dessus, en attendant je me contente d'avidement guetter leurs diffusions télé dans l'espoir de dénicher la perle rare. L'heureux élu du jour, 3 chances pour Emma donc, ne varie pas énormément la recette. Pire même, avec son histoire de fée qui vient magiquement aider une adolescente en crise à régler ses problèmes existentiels, il nous rappelle étrangement une production du studio antérieure : 16 voeux, monument et à lui seul film emblématique du genre.
3 chances pour Emma, c'est donc l'histoire d'Emma, jeune collégienne à la vie bien compliquée. Jugez plutôt : récemment élue rédactrice en chef du journal de son école, elle doit gérer à la fois l'incompétence de ses collègues apprentis journaliste, les pitreries de son farceur de petit frère et son attirance pour le traditionnel beau gosse sportif de l'école, charmeur mais au QI d'huître. Le beau gosse en question, répondant au doux nom de Chris, est face à une situation épineuse. Seule sa réussite du contrôle d'histoire à venir lui assure l'avenir auquel il aspire dans une université sportive. Hors comme étudier l'histoire de gens morts depuis des décennies c'est quand même bien chiant, notre bellâtre décide plutôt de quémander l'aide de la douce Emma, lui proposant astucieusement qu'ils échangent leurs copies le jour dudit contrôle. Tactique sans faille bien entendu, et la jeune fille, guidée par ses hormones, accepte sans broncher. Elle fait alors la connaissance d'une bien curieuse dame : affublée de fausses ailes, mais dotée d'une vraie baguette magique (quoi de plus logique en effet !), elle offre à notre héroïne un médaillon lui accordant trois « chances », c'est-à-dire trois possibilités de revivre les deux derniers jours en apprenant de ses erreurs à chaque fois. Dès lors, le schéma apparait limpide, le film va nous faire revivre trois fois les mêmes évènements, en altérant à chaque fois de menus détails. Une structure déjà vue dans des films comme Un jour sans fin, et qui fera bien entendu ses preuves avec la même ingéniosité dans cette production, rappelons-le, Disney Channel.
Le film fait en effet preuve d'une évidente justesse concernant le traitement de ses personnages. Résumons : dans la première partie du film, tous les personnages sont, en gros, des connards. Ils vont ainsi user et abuser de leur tact pour quémander des faveurs à la charmante Emma, avant de platement l'envoyer chier lorsque lesdites faveurs ne rencontreront pas les effets escomptés. Sa journée de finit ainsi de manière bien triste : abandonnée par tous, elle décide finalement de s'accorder une deuxième chance, et de revivre les deux dernières journées, en tâchant de mieux faire cette fois. Bien entendu, lorsque lui est offerte l'opportunité de tout recommencer, la belle se dit « arrêtons d'être une bonne poire et disons merde à tous ces vauriens ! ». Ce qu'elle fait. Sauf que, ô surprise, cela ne marche pas mieux que la dernière fois, notre héroïne se retrouvant ainsi, à la fin de sa journée tout aussi malheureuse et désemparée que lors du premier essai. Ciel, voilà quelque chose que personne ne voyait arriver, envoyer chier notre monde n'est donc pas la solution à tous nos problèmes ? Ce film essayerait-il d'insérer dans nos cerveaux une morale bien pensante et déjà vue 5000 fois ? Billevesées !Notre ingénieuse héroïne décide donc de tout recommencer une dernière fois, en veillant bien à être généreuse mais ferme, diplomate mais décidée. Et là, comme par enchantement (on ne croit pas si bien dire!), tout marche. Ses problèmes sont miraculeusement résolus, tous ses condisciples voient en elle une amie dévouée, et, mieux, le beau Chris, l'objet de ses fantasmes adolescents, tombe sous son charme et décide même de manifester son affection en prenant par la main sa nouvelle conquête (osé n'est-il pas !). Encore une fois, Disney Channel préfère l'originalité à la facilité, surprend et malmène son auditoire pour mieux l'emmener vers une conclusion toute en nuance.
Une construction pleine de surprises, de rebondissements périlleux, mais aussi une réflexion sur la condition adolescente, atteignant même des portées métaphysiques et philosophiques sur la question du choix et de ses conséquences. Et comment ne pas être touché par le destin d'Emma, fille à la personnalité aussi attachante qu'un joli sceau, comment ne pas vouloir la suivre jusqu'au bout du monde dans sa quête pour conquérir ce brave Chris (ki é kan mm tro bo <3) ? Qu'il est dur tout de même d'être une adolescente belle et intelligente dans une famille américaine moyenne ! Quant au Chris en question, notons à nouveau l'originalité de l'écriture de son personnage. Au premier abord plutôt con et... quand même relativement con, son apparente désinvolture cache en réalité une blessure secrète : sa mère est morte durant son jeune âge, voilà encore une bien belle manière, pas du tout superficielle et déjà vue mille fois, d'apporter au personnage une profondeur insoupçonnée. Le film a également l'audace d'inclure un personnage homosexuel, du jamais vu chez Disney Channel ! Oh ses préférences sexuelles ne seront jamais explicitées, il ne faudrait quand même pas choqué les jeunes filles des bonnes familles chrétiennes auxquelles ce film est bien entendu destiné, le film se contentera de pousser à fond le cliché du « Gay Best Friend » (comprenez : personnage masculin féminisé au possible) en espérant que la pilule passe.
Alors, ce Disney Channel Original Movie est-il à la hauteur des attentes ? Le film se suit bien entendu avec enthousiasme, jouant de personnages nuancés, de situations hilarantes mais également d'une justesse dans sa réflexion sur les enjeux du choix et le poids de la vie adolescente. Mais il manque hélas d'un certain panache, d'une certaine audace peut-être, l'empêchant de se hisser au niveau d'un Teen Beach Movie ou d'un Appelez-moi DJ Rebel. Un DCOM mineur donc, mais à voir tout de même.