Bitch.
Ce film est dur. Très dur. Il passera comme une histoire d'amour banale pour certains mais si vous avez vécu la même chose une fois dans votre vie, il vous rappellera de très mauvais souvenirs. Une...
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le 14 mai 2010
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7
Nous sommes en 2009, et Marc Webb vient de sortir en salle le plus beau film d'amour jamais créé.
Je m'explique.
Toi aussi tu es déjà tombé amoureux/se ? Tu connais donc cet attachement inexpliquable qui, quoi que tu fasses, te ramène vers un autre humain. À l'heure où j'écris cette critique, nous sommes 7.059.181.177 personnes sur terre. L'amour, le destin, la vie, la coïncidence appelons ça comme nous le voulons, nous a conduit vers l'inconnu(e), vers cet(te) "autre", pour qui l'on est prêt à s'oublier partiellement ou totalement.
"(500) days of Summer" se base sur un slogan on ne peut plus simple :
This is not a love story. This is a story about love.
Où comment mettre à l'amende en une phrase une industrie du cinéma qui, depuis sa création, respecte un postulat simpliste visant à représenter les histoires d'amour comme on aimerait les percevoir : on ne peut plus douce, mielleuse, héroïque, romantique...
Attention, c'est aussi ça l'amour, mais pas que.
Rares sont les films (dans les nombreux que j'ai vus jusqu'à présent) à avoir réussi à contourner le piège du processus narratif exprimant l'amour comme tout beau et tout rose.
Je ne peux évidemment que vous recommander le tragique "Pierrot le fou" de Godard (1965), qui au-delà d'être lui aussi l'un des plus beaux films du genre est avant tout l'une des plus grandes oeuvres sur la liberté. Que dire du joyau de Michel Gondry "Eternal Sunshine of the Spotless Mind " (2004) ou du diamant brut de Spike Jonz "Her" (2011)...
"(500) days of Summer" ne peut se définir au dessus des quelques oeuvres ci-dessus en terme d'originalité scénaristique. Mais quelle est la seule entité à pouvoir triompher de la fiction narrative? La réalité.
Elle parle la réalité. À toi, à moi. Et quiconque aura déjà vécu une histoire d'amour compliquée ne peut que se retrouver dans ce film. Provoquer une rupture ou subir une rupture. Etre trahi, être trompé. Déraper. Tomber amoureux de l'autre à un moment où ce dernier ne peut recevoir d'amour, par envie ou par choix. Tomber fou de quelqu'un qui n'a pas les mêmes attentes que nous. S'attacher à une personne qui ne veut pas de nous. Ne pas vouloir de quelqu'un.
Nombreux sont les scénarios possibles en termes de relations amoureuses. Mais un sentiment se réveille généralement à la suite de l'un de ces différents cheminements : la souffrance.
Elle peut venir pendant, après ou... jamais.
Marc Webb, réalisateur de clips musicaux à la base (pour GreenDay, Maroon 5 ou Lenny Kravitz, rien que ça!), décide de mettre la souffrance (sentiment humain que l'on a tous déjà ressenti) au service de son film. Il inclut d'ailleurs ses propres plaies dans une scène d'introduction aussi unique que légendaire :
“Any resemblance to people living or dead is purely coincidental…
Especially you, Jenny Beckman…
Bitch.”
Ça commence fort. C'est ensuite une délicieuse voix off qui vient nous annoncer la catch-line énoncée plus tôt dans la critique.
Le film repose sur une chronologie unique, Webb voyageant entre les diverses périodes d'une relation (qu'il représente comme des saisons), du premier jour (1) au dernier (500). Cette notion de cycle est si simple qu'on l'assimile tout de suite l'idée qu'elle cherche à mettre en place : un scénario, mais à l'envers. Mais pas dans le sens du "Irréversible" (2002) de Noé. Dans le sens d'une histoire d'amour. De souvenirs. De mots, de sensations.
Le rythme ne peut donc que faire voyager, puisque le spectateur alterne constamment entre le passé et le futur, qu'il perçoit toujours au présent. Vulgarisée au possible, la forme ne peux donc pas nous perdre. Elle devient même un moteur.
Après la voix off Richard McGonagle (créditons-le, ça ne coute rien), c'est au tour des personnages de s'immiscer dans l'histoire.
À ma droite, Tom Hansen, incarné par le merveilleux Joseph Gordon-Levitt, peut tout jouer. Acteur reconnu, il sera parfait dans la peau d'un homme au coeur brisé, alternant entre espoir et dépression. Sa nonchalance n'a d'égale que sa sympathie, et ce monsieur-tout-le-monde au sourire ravageur devient donc le choix parfait pour le premier rôle.
À ma gauche, Summer Finn, jouée par Zooey Deschanel. Ravissante, pétillante, surprenante, chacun des adjectifs en -ante existant est parfait pour la décrire. Dans la peau d'une épicurienne, qui ne suit que ses envies, elle va venir chambouler le petit coeur fragile d'un JGL qui aura le soutien du public. Pourtant, impossible de la détester : elle a ses raisons.
Match nul. Les deux acteurs se complètent, et le duo est parfait. On s'y attache. Il est sur le papier l'archétype parfait du couple sans problème, où l'amour ne divisera pas (tu sais celui que tu peux voir dans pleins de comédies romantiques).
Mais non. BAM. Marc Webb crée une relation d'amour au jour le jour. Ou, comme depuis la nuit des temps, l'un donne pendant que l'autre reçoit. L'un s'attache un peu plus, malgré les avertissements répétés de sa partenaire). L'amour est réciproque évidemment, mais il n'est ni transmis de la même manière, ni perçu avec la même intensité. S'installent des non-dits, de la frustration, de l'incohérence
(avec ce traumatisant "You never wanted to be anybody's girlfriend, and now you're someone's wife?")
et surtout, beaucoup, beaucoup de tristesse. Elle est imagée par un arbre qui perd ses feuilles, et elle parle à quiconque l'a déjà vécue. Elle est là, elle reste en nous, que l'on ait 20 ans ou 80. La beauté de l'amour, c'est d'accepter que toutes les histoires même les plus belles, ont une fin. Et on ne la choisit pas forcément. Heureusement, un arbre ne perd jamais complètement sa vitalité, et c'est avec le temps que viendront de nouvelles branches. Plus solides.
Dans ce "(500) days of Summer", je vois une histoire d'amour moderne. Le mythe de l'homme viril qui s'effondre (quel bonheur) et qui a le droit, lui aussi de ressentir des émotions, cassant par la même occasion la doctrine vieille comme le monde du "tous les hommes sont des connards en amour". Bah non. Un homme aussi ça se fait quitter. Un homme aussi ça peut souffrir.
Parallèlement, c'est l'émancipation de la femme qui est filmée. Ici, on laisse Summer avoir son libre arbitre, elle ne subit plus la relation comme les actrices d'antan, mais la dirige à arme égale. Regrettera-t-elle ses choix ? On ne le saura jamais. Mais au moins, ce sont "ses" choix. Elle est une femme qui ne croit pas en l'amour, mais en l'instant présent.
Important aussi de voir le développement des personnages par rapport à leurs vécus, au destin des parents, aux oeuvres qu'ils ont consommées, aimées...
Deux mains qui se touchent sur un banc après 1H31 de film, et c'est l'incompréhension.
Pourquoi? Le couple semblait amoureux, il y avait du rire, des partages, des confessions. Mais parfois, l'amour ne suffit pas, et si l'idée du film est simple, son fond n'en est que complexe.
"(500) days of summer" démolit les codes, et se veut le porte parole de la lutte contre la représentation faussée de l'amour, que l'on nous impose dans les médias, sur les réseaux sociaux, au cinéma et même dans les cartes de voeux. L'Amour avec un grand A, celui qui touche tout le monde, qui peut être familiale, amoureux, maternel, paternel, fraternel, mais aussi pour les gens qui sont partis, qu'ils ne soient plus ou aient juste pris un chemin différent du notre. Cet Amour, il peut prendre tellement d'autres formes... Mais il se ressent. Il ne se mesure pas, et n'a pas à être dicté. Personne n'a à normaliser l'amour, à l'enfermer derrières codes et images. Dieu que l'amour est triste mais Dieu que l'Amour est beau.
Avec sa photographie léchée signée Eric Steelberg (le jaune c'est la lumière, la chaleur. La lumière de Tom, c'est Summer.), cette oeuvre se regarde terriblement facilement. Je célèbre beaucoup le talent de Marc Webb, que j'adore (il a réalisé l'excellent "Mary" plus récemment), mais j'oublie de parler de Scott Neustadter et Michael H. Weber pour ce magnifique scénario et même Alan Edward Bell pour ce montage sur lequel repose très clairement la qualité du film.
Enfin, comment ne pas parler de cette bande originale absolument géniale ? Il y en a pour tous les gouts ! Des classiques des groupes "The Pixies" ou "The Smiths" ("I love the Smiths", évidemment) en passant par des belles découvertes comme la chanteuse "Feist" (et même du Carla Bruni) ou une chanson interprétée par Patrick Swayze, sans oublier les compositions originales de Mychael Danna et Rob Simonsen, la bande son n'a rien à envier à qui que ce soit !
En quelques mois et après une dizaine de visionnage, "(500) days of summer" est devenu mon film pansement, celui qui me fait du bien le temps d'une heure quand tout semble aller mal. Il est aujourd'hui l'une mes oeuvres préférées, que j'aime conseiller quand je parle de cinéma.
J'en suis conscient. L'amour que j'ai pour ce film n'est peut être qu'une question de vécu, de ressenti.
Mettant mon empirisme de côté, je ne peux que très objectivement vous le recommander. Il a des qualités certaines, et, à l'image de cette fin très ouverte, fait relativiser sur le temps qui passe.
Magistral.
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Créée
le 25 févr. 2021
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