Prix du Public de Gerardmer en 2010, ce film québécois de Éric Tessier a été tourné en collaboration avec le romancier Patrick Sénécal, dont l’œuvre a directement inspiré le métrage. Dans le film comme le roman, un étudiant est pris en otage par une famille, dont le père d’apparence insipide, prend très à cœur sa mission de justicier.
Vivace et imprévisible, le résultat est le fruit d’un parti-pris radical. Nous passons deux heures d’une banalité aberrante au sein de cette tribu tarée, enchaînant les face-à-face bigger-than-life et les petits événements légèrement surréalistes. La famille est au bord de l’implosion, tandis que Yannick noue des contacts subtils et contradictoires avec ses hôtes, tentant notamment d’amadouer la mère dépendante.
On peut rester pantois, d’autant que le film s’éparpille (incrustations fantastiques, bizarreries permanentes) puis resserre l’étau, toujours en se donnant comme un témoignage issu d’une galaxie parallèle ; mais certainement pas froid, tant Rue des Ormes s’assimile à un laboratoire psychologique sans la moindre distance avec son sujet. Une logique se découvre progressivement autour de ce combat illuminé pour le Bien et de cette histoire de séquestrations plus ou moins consenties.
Malheureusement, Marc-André Grondin (vu dans C.R.A.Z.Y) campe un personnage décevant dès le départ, apparaissant comme le "jeune" de BD ringarde. Résumable à ses pathétiques »fuck » en réponse à toutes choses et à sa tête de grunge apathique, il n’inspire aucune affection, les auteurs eux-mêmes semblant ne l’envisager que comme un cobaye. Malgré les avancées du film et la complexité accordée à chacun des protagonistes, cette limite concernant le héros restera, privant d’une attache qui serait décisive pour adhérer à ce projet décalé.
Entre Bernie, Canine et les travaux de Bouli Lanners, un thriller ironique avec une atmosphère spécifique, jamais glauque ni même tellement inquiétante malgré son sujet.
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