Plutôt méprisé lors de sa sortie (et toujours incompris de nos jours par certains), ce 13ème film du regretté Joel Schumacher a trop souvent été comparé à Se7en, écrit par le même Andrew K. Walker.
Mais pourtant ces deux films sont très différents de par leurs traitements: ici nous avons des personnes qui aiment ce qu'ils font et ne se trouvent même pas d'excuse, au contraire du John Doe qui se croit investi d'une mission divine pour couvrir son propre échec personnel.


Le film a souvent été taxé de réactionnaire ou de vigilante movie ou...
Non, vous n'y êtes pas du tout, les gars !
Avez-vous vu le film correctement ?
N'avez-vous pas décelé dans le comportement de Tom Welles quelque chose d'incontrôlable ?
N'avez-vous vu la scène finale ni entendu la supplique de ce même Welles ???


Il est d'ailleurs à noter que le film ne fait pas l'étalage de scènes choquantes: nous ne voyons finalement que très peu de choses car le snuff movie est quasiment elliptique et de fait, nous ne pouvons même voir aucun coup de couteau (tout comme dans Psycho, c'est le spectateur qui les imaginent) et pareillement, les scènes se déroulant dans les shops underground ne laissent que très peu de matériel graphique à se mettre sous la dent.


Schumacher laisse au public le soin de remplir les blancs graphiques et il a réussi son coup puisque ceux qui vomissent sur le film pointent le côté glauque des images alors que Game of Throne ou autre American Horror Show étalent bien plus de violence graphique...et ce, à la télé !
Alors avant de cracher sur le film, veuillez le voir réellement, image par image s'il le faut !


Bref, nous avons ici Tom Welles (Well = bien) qui accepte ce contrat de la délicate Mme Christian (Chrétien, pour ceux qui sont passés à côté) qui a découvert un film en 8 MM (d'où le titre, bien sûr) où une jeune femme se fait assassiner à l'écran...ou pas.


Le film ne traite pas vraiment des snuff-movies (sont-ils réels ? Je n'ai aucun doute là-dessus car l'âme humaine peut-être parfois bien sombre) mais de cette pauvre Mary (Marie) bien innocente (dans tous les sens du terme) qui sera sacrifiée pour assouvir un besoin que seul un milliardaire peut se payer pour tromper l'ennui...et parce qu'il le peut !


8 MM relate donc le chemin de croix de cette pauvre âme pure qui croyant accéder au Paradis va se retrouver en Enfer et ce, à cause de sa confiance éperdue en l'être Humain.


8 MM raconte aussi en parallèle, le propre chemin de croix de Tom Welles qui pensant être un Ange voulant faire le Bien (Mary est une éventuelle version future de sa propre fille) va se brûler les ailes au contact de ce monde underground et va finir par l'embrasser en devenant le Bourreau à la solde du Bien (de Dieu, donc).
De fait, il se montre orgueilleux et devient un émule de Lucifer (l'Ange déchu) en appliquant la vengeance du Tout-Puissant et sur Eddie Poole et sur Machine...devenant ainsi l'Un d'Eux.


D'où l'importance capitale de la supplique finale de Welles à sa femme, où son regard hanté contredit l'esquisse de sourire qui s'amorce sur son visage tourmenté:


"Save ME..."


Dance With The Devil by Mychael Danna


https://www.youtube.com/watch?v=FB7o9dQQa3Q


Tom se sait alors perdu et la tuerie a réveillé en lui la Bête que chaque Humain a en son sein...


Nous sommes donc bien loin d'un vigilante movie ou d'un film faisant l'apologie de la pornographie.
Il s'agit simplement de deux destins mêlés entre Paradis et Purgatoire, ce qui en fait donc un film sur la Culpabilité (Tom voulant se racheter de sa vie un peu futile car il s'insinue dans la vie des autres pour gagner sa croûte) et la Rédemption (il veut se sentir utile pour sa fille Cindy - en Latin Lucinda soit Lumière -/Mary).


Il y a donc un côté religieux indéniable mais amené de manière assez subtile puisque beaucoup de critiques ne sont jamais allés au-delà du premier niveau de lecture (Tu ne jugeras point...avant de réfléchir) ce qui fait de 8 MM l'un des meilleurs films de Joel, mais aussi de Nicolas Cage.


Et Max / Joaquin, me direz-vous ?
Une âme perdue tentant de donner du sens à sa vie mais déjà condamnée avant même de pouvoir se racheter (lui aussi) de sa vie futile (soit servir les bas-instincts de ses semblables)...


Je n'oublierai sûrement pas de citer Jenna Powell (la pauvre Mary) qui l'espace de quelques secondes donne corps à la tristesse insondable de ce qu'elle perçoit comme étant sa propre fin, le regard perdu dans le vague inondé de larmes.


Marquante aussi la réplique du Machine démasqué (ndlr: devant l'impossibilité d'utiliser la fonction "spoiler", je vous le dis donc):


_________________________________SPOILER !!!________________________________



  • "What did you expect ? A Monster ? (...) I wasn't beaten. I wasn't molested. Mommy didn't abused me. Daddy never raped me. I'm only what I am..."


____________________________________FIN_______________________________________


C'est donc une plongée Aux Coeurs des Ténèbres que nous avons ici, les Ténèbres se tapissant en chaque être Humain.
Libre à nous de ne jamais les laisser faire surface...ou de les libérer et ainsi lâcher prise avec notre propre Humanité...le côté positif j'entends car qu'est-ce que l'Humanité, après tout..?


8 MM mérite donc bien plus que son aura sulfureuse (de sulfureux n'est que le concept du Mal ancré dans chaque humain) ou de sa réputation d'apologie de la violence ou de film réac ou autres conneries prononcées par ceux qui ne voient pas...


Enfin, n'oublions pas la magnifique composition de Mychael Danna qui donne un côté exotico-mystérieux avec ses envolées Orientales et ses chants mystiques.


Bref, il est temps de réhabiliter ce film !


Hollywood by Mychael Danna


https://www.youtube.com/watch?v=Fef7ChyTHuo

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le 21 mars 2021

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