Le film a, il faut en convenir, ses maladresses. La dernière partie, notamment, n’est pas très bien amenée et les actes du personnage interprété par Nicolas Cage ne brillent pas toujours par leur cohérence. Mais de là à dessouder le film comme l’a fait, à grands renforts de morale à deux sous, la critique à sa sortie, c’est affreusement affligeant. Un film ne peut donc pas raconter l’histoire d’un type qui perd les pédales et qui mène sa propre justice ? C’est forcément le propos d’un film fascisant, abject et malsain ! Quelle foutaise ! On ne dit pas que le résultat est un modèle de finesse mais le film raconte aussi autre chose. Bien entendu, l’ensemble fait dans le racoleur. Mais comment pourrait-il en être autrement quand on décrit une plongée dans le monde pornographique amateur avec ses dérapages inévitables ? En cela, Huit millimètres est une sorte de Hardcore revu et corrigé vingt ans plus tard, autrement dit en plus trash, en plus malade.

Que les détracteurs du film me pardonnent, mais je n’ai pas trouvé dans ce script de ressemblances particulières avec Seven. Le scénariste des deux films ne traite aucunement des mêmes thèmes, si ce n’est, peut-être, à la limite, un peu celui de la vengeance, mais cela reste très tiré par les cheveux. Il y a bien quelques scènes sous la pluie, mais c’est bien court comme argument. Tout juste pourra-t-on donc comparer la descente aux enfers de Brad Pitt à celle de Nicolas Cage et saluer la qualité du rythme de Huit millimètres. L’ensemble s’articule en trois temps : une enquête qui ressemble vraiment à une enquête et qui n’est jamais ennuyeuse (à la fois dans les bureaux et sur le terrain), une révélation aussi effroyable qu’espérée et un final sous forme d’une vengeance crépusculaire. Au-delà d'un schéma qui peut effectivement rappeler le film de David Fincher, les enjeux du film ne sont pas du tout les mêmes.


Porté par une ambiance glauque et noire, un casting aux petits oignons (Joaquin Phoenix toujours aussi parfait) et quelques scènes dérangeantes, le film atteint parfaitement sa cible. Joël Schumacher, à juste titre critiqué par moments, offre ici une réalisation maîtrisée avec de très belles séquences (notamment une belle poursuite en voiture en travelling à travers des immeubles) et une excellente gestion des temps forts et des temps faibles. On pourra sûrement reprocher au film une tendance à en faire parfois un peu trop, de la mise en scène tape-à-l’œil en fin de piste à l’interprétation un poil trop grimaçante de Nicolas Cage (mais je n’ai jamais été très fan de son jeu). Autrement, c’est un vrai thriller des années 90 de qualité qui a la bonne idée de se démarquer de ses contemporains en ne traitant pas d’un tueur en série. Le résultat n’en est que plus effrayant encore.

Play-It-Again-Seb
7

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le 31 janv. 2023

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PIAS

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