Le premier plan annonce la couleur, pourtant : une lente chute interminable dans l'abîme. Je ne devrais donc pas pousser le cri du coeur de mon titre. Cependant, 99 Francs est comme les publicités qu'il est censé condamner : il trompe sur sa marchandise.
Après une présentation du nommé Octave façon Fight Club du pauvre, un personnage détestable parigot prétentieux imbu de lui même, désirant autre chose que ce qui est dans la main généreuse à lui offerte, le film ne sait déjà plus où il va, signe que le néant qu'il représente ne suffit pas à lui seul pour faire un film. On s'achemine donc vers une critique aux oripeaux cinglants du monde de la publicité (qui prend ceux à qui elle s'adresse pour des cons, quelle surprise !) et de ses acteurs (que des drogués, des friqués ou des abrutis, quelle découverte !). Il étale ensuite son faux trash bon marché, pathétique et toc bien propre sur lui, aussi transgressif que le gamin d'une famille vieille france qui refuse de débarrasser la table du déjeuner dominical. Puis brusquement, retour sur notre Octave, subitement subverti en Tyler Durden small teuf' dont la voix off, envahissante, achève d'abrutir son spectateur.
99 Francs est une grenouille thématique qui se rêve aussi grosse que son boeuf de réalisateur. En effet, Jan Kounen est impeccable et c'est lui qui essaie de garder le bateau sur le bon cap grâce à sa caméra virtuose. Et en plus, il se permet le luxe d'expérimenter, le coquin, unique chose qui permet de rester éveillé : bads trips bourrés d'effets spéciaux, séquence animée, etc... Il est à ce titre très rigolo que ce film soit apprécié (6.3 quand même sur SC) alors que quatre années auparavant, Blueberry : l'Expérience Secrète osait les mêmes délires hallucinatoires pour obtenir, en retour, qu'une volée de bois vert et le droit de se faire conchier de manière unanime. C'est fou comment les goûts et les couleurs peuvent fluctuer en aussi peu de temps...
Comme si Kounen ouvrait les yeux sur ce qu'il a fait, le générique final qualifie ce qu'on a vu de "produit cinématographique". Quelle belle définition pour un film bicéphal, à la réalisation aussi soignée et virtuose et au contenu aussi inoffensif et consensuel. Ultime franchise, hélas avouée bien trop tard.