Oui voici quatre critiques en une car j'ai eu la brillante mauvaise idée de mater les quatre versions de cette histoire la même journée...
*Version de 1937 avec Janet Gaynor
Il est 10h00 et j'attaque le premier film en m'attendant à quelque chose de vieillot et de terriblement ennuyeux. Ce fut le cas pour au moins la première demie-heure mais finalement le film s'avère être étrangement moderne (pour l'année 1937) dans son genre mélodramatique. Il y a un bon équilibre entre les bons sentiments inhérents aux films hollywoodiens de l'époque et la manière plus osée d'aborder des thèmes plus sombres comme l'alcoolisme. Le film n'hésite pas à critiquer le Hollywood derrière les paillettes et à se montrer très mordant. Une pointe de féminisme s'y fait également déjà sentir. Janet Gaynor est attachante (sans doute plus que ses successeures) mais je ne suis pas objectif devant ce petit minois. Sortie de l'ère du muet et du noir et blanc durant laquelle elle avait eu le droit à un oscar, la belle se retrouve habillée des couleurs pas encore trop criardes du technicolor et offre une prestation vocale plus que respectable mais cela ne suffira pas à chopper une deuxième statuette. Fredric March est comme toujours impeccable. William A. Wellman a été plus inspiré dans sa carrière mais fait du bon boulot. Le film avait d'abord été proposé à George Cukor qui le trouvait trop proche de son film What Price Hollywood. En résumé le film est plus que dispensable et pas toujours très prenant mais possède suffisamment de scènes marquantes (chaque moment important de l'histoire) pour être vu et avoir enfanté plusieurs remakes.
*Version de 1954 avec Judy Garland
Il est 13h30 et je me lance dans la deuxième version, quelque peu rassuré. George Cukor a finalement changé d'avis et a décidé de mettre à son tour cette histoire en images en s'appuyant sur la présence de la star Judy Garland. Elle rentre davantage dans le moule de la star glamour hollywoodienne que sa prédécesseure, avec ce genre de robes très tape-à-l’œil des années 50. Et bien malgré toute la sympathie que cette dernière peut dégager, elle fut pour moi le point noir du film. Ces numéros musicaux « ringardisent » totalement le film. Le terme est peut-être un peu fort mais c'est ce que j'ai ressenti. Attention ne me faites pas dire ce que je n'ai pas écrit ! Elle est incroyable, elle rayonne mais elle détonne trop par rapport au reste du film au ton très âpre et ses musiques finissent par m'ennuyer sur la durée. James Mason quant à lui est grandiose, c'est à lui que revient le meilleur rôle du film. Cukor signe une mise en scène vraiment très belle, certaines scènes sont d'un onirisme cauchemardesque magnifique. Dommage aussi que le film soit si long et qu'on s'endorme un peu entre chaque moment réussi. Bref une version plus poussée où encore une fois de superbes scènes (en fait les mêmes que pour le premier film) sont venues me sortir de l'ennui provoqué par la durée du film et le fait que je n'apprécie que très peu le genre (j'aurais pu commencer par là). Objectivement, ça reste la meilleure version.
*Version de 1976 avec Barbra Streisand
Il est 17h00 et je ne suis plus sûr de vouloir revoir la même histoire une troisième fois d'affilée mais je suis intrigué par le tournant apparemment plus rock de l'histoire. En effet, on quitte cette fois-ci le vieil Hollywood pour la scène rock des 70's et les Oscars laissent la place aux Grammy Awards. Unanimement reconnue comme la moins bonne version, je ne peux être que d'accord. Le scénario ne vient rien ajouter hormis peut-être des clichés et du sexe, il ne comprend rien à l'esprit rock de l'époque, la réalisation est mauvaise (le réal est un no-name écrasé par l'égo de la star du film), Kris Kristofferson est mauvais (autant en acteur qu'en chanteur) et Barbra Streisand s'en sort sans briller au niveau d'une Janet ou d'une Judy. L'émotion est moindre et on s'ennuie avec pour le coup, aucun sursaut. Je pensais que ça serait la meilleure version, au moins d'un point de vue musical, plus en accord avec mes goûts mais même pour ça c'est catastrophique.
*Version de 2018 avec Lady Gaga
Il est environ 20h00 et je m'apprête à découvrir la dernière version en salle (parce que j'ai un billet gratuit hein...). L'idée d'un troisième remake me paraît légitime. Les différentes versions sont suffisamment espacées dans le temps pour que de nouveaux genres musicaux se soient développés et que de nouvelles stars soient nées. Chaque actrice est d'ailleurs très bien choisie et représentative de son époque mais je me demande si ça aurait pas été plus dans l'esprit de l'histoire de prendre des inconnues... Alors oui commençons par le fait que je n'aime pas Lady Gaga, machine marketing trop fake pour moi, mais la voir au naturel dans quelque chose sans excentricité gratuite a quelque chose de rassurant. Tout le monde sait qu'elle va rafler tous les prix majeurs à venir afin de booster les audiences des cérémonies et cela m'insupporte déjà (car d'autres actrices seraient sûrement au moins autant méritante) mais j'espère que ce sera moins scandaleux que pour son premier Golden Globe, vraiment immérité. Je connais donc déjà le scénario, je sais que le duo d'acteurs principal a parfois tendance à m'agacer et j'ai déjà entendu les chansons qui s'écoutent mais ne sont pas dingues non plus. J'attends donc avec peu d'espoir quelques bonnes surprises.
Bon ben au final, c'est vite fait sympatoche, pas aussi insupportable que je l'imaginais, mais c'est d'un vide... J'aurais pardonné le manque d'originalité si les dialogues n'étaient pas aussi souvent indigestes, ça n'échappe pas non plus aux clichés. En fait, Lady Gaga dénonce tout ce qu'elle a fait dans sa carrière, je comprendrais jamais pourquoi vous mettez cette femme sur un piédestal... Elle a une voix, certes, je ne le nie pas, mais ça suffit pas. Les acteurs sont assez bons même si on frôle parfois de très près le caricatural. Pas grand chose à dire de plus parce qu'il n'y a rien à voir, si vous aimez le genre vous aimerez, tant mieux pour vous. Là où le film de 1937 était novateur, on se rend compte que l'histoire a à peine évolué et qu'elle est devenue d'une affreuse banalité, fade et artificielle. Et pire encore...mièvre. Ce qui arrive au perso de Bradley Cooper ne suffit pas à donner du relief au film et faire naître le début d'une émotion en moi. Je ne vois que Cooper et Gaga faire tout ce qu'il faut pour chopper des prix mais sans la moindre sincérité. La mise en scène est maîtrisée mais reste assez impersonnelle, hormis quelques passages aux jeux de lumières hasardeux. Le montage et la gestion des ellipses, forçant des dialogues trop explicatifs, seraient à revoir. Les personnages secondaires sont également très mal traités, on pose des sous-intrigues qui seront réglées de manière bâclée en une ou deux phrases. S'il me trotte encore des mélodies en tête, j'en ai déjà plus aucune image (contrairement au film de Cukor). Non ça n'a pas les qualités d'un film à oscar. Parions toutefois que l'Académie voudra se faire bien voir et votera comme l'année dernière pour le film surcôté de l'année.
Bref, c'est cool pour les amateurs du genre qui tairont les défauts et les longueurs qui gêneront davantage les autres. J'ai pas envie de râler contre ces films car finalement ils m'indiffèrent pas mal malgré quelques fulgurances artistiques par-ci par-là (surtout dans les plus anciens). Sur ce, vous pouvez lâcher des "j'aime pas" inutiles ou des commentaires utiles, moi je retourne voir La La Land.