En deux films, le style Craig Zahler est établit: mouvement de caméra à minima, corps lourd et découpage brutal. Tout dans le cinéma de Craig Zahler, est une question de trajectoire: traverser un espace (allégorique ou pas, l'Amérique, le désert, etc..), un lieu (un couloir, un ponton, une pièce), mais aussi traverser un état, mental ou moral, y compris pour le spectateur. Lorsque Brawl in cell block 99 commence, par exemple, nous ne savons pas vraiment sur quel pied danser vis à vis de Bradley Thomas. Lui, qui apparaît Skinhead et croix tatoué sur la tête, peut faire peur. Lorsqu'il démolie la voiture de sa femme à mains nues, on se demande tout de suite si sa femme va subir le même sort. En fait, toute les attentes qui caractérise le personnage qu'incarne Vince Vaughn dans le film sont déjouée une à une, jusqu'au point où, une fois au bout du film, l'on est retourné par l'émotion que ce personnage abrupte va exprimer.
Son désir de fonder une famille dans un milieu catholique et libéral est à la fois simple à exprimer et pourtant complexe à atteindre: avoir un bébé s'oppose à la fausse couche, réussir professionnellement s'oppose à la légalité, etc...
On lui explique qu'il piétine les idéaux que représente le drapeau américain, il rétorque qu'il en a deux chez lui.
De l'injustice justement, dont Bradley se présentera comme une victime, la victime presque divine, allégorique, représentative de tous (stigmate sur les mains et les pieds, croix à porter graver sur son corps) et en même temps doué d'une force de résistance surnaturelle, comme un roc, traversant le film sans presque jamais tressaillir, portant sa croix jusqu'au bout. Si bien qu'il provoque une empathie chez le spectateur que le final viendra expier, véritable climax, dont la violence cathartique finale libère et apaise.
Si Bone Tomahawk n'était pas vraiment un western au sens strict du genre, Brawl in cell block 99 n'est pas vraiment un film de prison non plus. Juste un prétexte, une façade, un récipient pour une recette explosive dont ne sortent indemnes que les vieillards et les innocents.


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le 18 juil. 2018

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