Jamais un biopic n'a été ainsi confectionné. Narrant la vie tumultueuse de Michael Peterson alias Charles Bronson, connu pour avoir passé la majeure partie de sa vie en prison, le réalisateur danois Nicolas Winding Refn (la trilogie Pusher) nous livre ici un film étonnant, déconcertant même, réinventant le biopic à sa manière en mélangeant le réel et l'imaginaire autour de cet être hors du commun, très difficile à cerner tant son profil psychologique s'avère diablement ambigu. Quasi-muet, cette brute épaisse incarnée par un Tom Hardy méconnaissable est aspirée dans une spirale autodestructrice aussi volontaire que démesurée.
Comme s'il combattait constamment le mal par le mal, Bronson ne vit que de violence, s'acharnant sans cesse contre les matons, provoquant bagarre sur bagarre. Incapable de tenir en place, incapable d'être maîtrisé, le jeune anglais va effrayer le pays tout entier, devenant ce qu'il a toujours voulu être : une célébrité. Alternant entre pièce de théâtre atypique (où notre protagoniste grimaçant narre ses aventures), flashbacks multiples et images de ses séjours tumultueux en prison, Bronson est une œuvre indéniablement déconcertante, un OFNI qui peut s'avérer assez difficile à apprécier.
Outre la prestation tout bonnement hallucinante de Tom Hardy, habité et sincèrement effrayant (l'acteur, alors cantonné aux second plan, a pris 20 kg pour le rôle), la qualité de la mise en scène est en tout point irréprochable, Winding Refn usant de tout son talent pour nous amener dans un univers sale, glauque mais également paisible par moments, utilisant le pays de Sa Majesté comme un vrai anglais. Musique électro hypnotisante, photographie exemplaire et atmosphère à la frontière du lugubre et du psychédélique (on pense sans cesse à Kubrick), on ne peut rester indifférent face à un tel film, sorte de boucherie expérimentale certes très dure à cerner mais néanmoins épatante.