Le boloss aux pieds d'argile
Un biopic contemplatif barré sur un bourreau "as du barreau" devenu le plus dangereux détenu d'Angleterre, ça vous dit ? Si oui, suivez Refn, il tient la barre et l'a mise assez haut cette fois. Si tel n'est pas le cas en revanche, barrez-vous pendant qu'il en est encore temps. Bah, revenez !
Michael Gordon Peterson a passé les deux tiers de sa vie au sein d'établissements carcéraux, plus de cent au total. La plupart du temps, seul en cellule d'isolement. Le reste du temps, à martyriser d'autres détenus, le personnel de prison, quand ce n'est pas un VIP en visite officielle. Dépeint comme un être violent, celui qui est plus connu sous le nom de guerre "Charles Bronson" cherche la notoriété, tout en étant dans l'incapacité de s'adapter socialement. A l'aise derrière les barreaux, au point de percevoir sa cellule comme une chambre d'hôtel, il s'adonne notamment à la peinture, entre deux agressions. Malgré son apparence et attitudes badass, Refn nous décrit également un être d'une grande sensibilité et fragilité, qui essaie tant bien que mal d'exprimer à sa manière ses émotions. Désaxé, perdu et livré à lui-même, il devient le genre d'individu à exiger un hélicoptère, une sex doll et une tasse de thé lors d'une prise d'otages. Gonflé !
Tom Hardy a suivi un entraînement de fou furieux, prenant 20 kilogrammes, en 5 semaines dit-on. On évoque le chiffre vertigineux de 2500 pompes par jour, de quoi se retrouver rapidement à côté d'elles pour le profane. A noter que le Bronson original se vante d'en faire 1700...en une heure ! Dans le film du danois, Hardy aura d'ailleurs un paquet (le mot n'est pas anodin) d'occasions de montrer le fruit de son travail titanesque, nu le plus souvent. L'homme seul, enfermé dans son pénitencier, tandis que le spectateur contemple son pénis entier. Le plus impressionnant reste son jeu (à Tom...). Très appuyé, théâtral, mais totalement dans le ton du film, une présence tout bonnement animale. Emporté par la fouille, l'acteur a même rendu visite au détenu afin de mieux le cerner, de s'imprégner, jusqu'à l'élocution et l'accent du taulard taulier. Bronson finira par raser sa moustache légendaire et l'enverra à celui qui incarnait Bane encore récemment. Après avoir été autorisé à voir le film quelque temps après sa sortie, sur le (mi)tard, le colosse déclarera: "Tom me ressemble plus que je ne me ressemble".
Musicalement en constant décalage avec les images, Refn implémente du Verdi, du Wagner, du New Order ou encore les Pet Shop Boys à sa mise en scène si singulière. "Bronson" est court, un bon format pour un film aussi percutant et frontal, les 1h30 passant sans encombre. Des dialogues pas forcément nombreux, mais parsemés d'humour, tout comme certaines situations. Et dire que le rôle de Peterson devait initialement revenir à Jason Statham...merci NWR et Tom de nous avoir épargné une crise d'hypertension !