Annoncé comme révolutionnaire dans le milieu gore français, avec une promotion alarmante et une tagline racoleuse, le premier film de Xavier Gens déboule en salles en janvier 2008, surfant autant sur la mode ricaine des torture-porn que sur l'essor qu'a pris le cinéma français à proposer de l'horreur depuis le revival Haute Tension. Bosseur sur le tas qui a su faire son chemin dans le milieu, Gens est un forcené, un artisan qui réussit à écrire et réaliser son premier film grâce à Luc Besson pour un résultat déroutant au premier abord mais finalement surprenant.
Frontière(s) part ainsi sur un postulat intéressant : une bande de racailles trouvent refuge chez des nazis lors du premier tour des élections de 2002, remporté par l’Extrême Droite. Un début un brin cafouilleux où l'action est quelque peu illisible, Gens usant de la shakycam et du montage épileptique pour essayer d'insuffler une dynamique à ses fusillades/course-poursuite. Arrivés dans le gîte campagnard peuplé de bouseux inquiétants et de séquences propres au malaise, on commence à sentir chez le réalisateur une forte envie de s'émanciper des précédentes œuvres françaises du genre pour se calquer sur le Massacre à la Tronçonneuse original, avec une mise en scène inspirée, très proche du film de Tobe Hooper.
Avec les moyens du bord, Gens livre pourtant un film à la photographie impeccable, aux décors soignés et aux idées neuves, contenant quelques séquences gore du plus bel effet. Dommage pour quelques acteurs cabotins (Samuel Le Bihan, Estelle Lefébure, Aurélien Wiik), deux/trois longueurs malvenues et surtout un final grand-guignolesque aussi interminable que franchement dispensable, le metteur en scène souhaitant clairement mettre tout ce qu'il a dans un final explosif et sanglant, quitte à tirer sur la corde avec bien quinze minutes de trop. Au final, alternant entre le très bon et le plus léger, Frontière(s) reste une œuvre puissante, intelligente, généreuse et unique en son genre, preuve qu'avec du savoir-faire et des idées le cinéma français n'a pas à rougir.